Chronique du critique influent : la revue "Le Musée du soir" éditée en volume

mis en ligne le 9 avril 2015

Nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer longuement en ces colonnes l'itinéraire des frères Berteloot, qui ont assumé pendant douze ans la publication de la revue ouvrière Le Musée du soir, ainsi que les difficultés matérielles pour mener à bien une telle entreprise : tout se passait « après l'boulot », comme disait Maurice Lime, sans grands moyens, sans grand matériel 1.
Aujourd'hui, alors qu'ils pourraient tranquillement cultiver leur jardin en bons retraités rangés, lesdits frères Berteloot ont entrepris de rassembler les exemplaires de leur revue, non sans mal ; il leur a fallu quasiment reconstituer la « collection », numéro par numéro. C'est chose faite aujourd'hui. Ils sont à même de proposer le recueil des troisième et quatrième séries du Musée du soir, soit dix-huit fascicules. Entièrement fait maison et cousu main, messieurs-dames (ce qui ne signifie pas en amateurs) comme en 1957, sauf que l'ordinateur a remplacé la vieille presse... Au résultat, 720 pages avec, comme l'écrit non sans fierté Paul Berteloot, « une élégante reliure ».
Le « prière d'insérer » tient en... huit pages et mériterait à lui seul de sortir en brochure ; il rappelle, grâce à un texte de René Bonnet, l'histoire du Musée du soir, tel qu'il a été conçu par Henry Poulaille dès mai 1934 ; il précise ensuite l'historique de la revue, pour conclure avec un texte de René Berteloot : « L'esprit du Musée du soir », qui rappelle les prises de position de la revue. « Nous ne prétendons pas régénérer les Lettres. Mais à côté de la littérature officielle, nous voulons continuer celle d'un caractère essentiellement humain. Nous avons notre mot à dire, ne fût-ce que par l'authenticité de nos témoignages, qui est, à notre sens, la plus importante qualité de l'écrivain 2. »
Constat actuel ? « Le prolétaire n'est plus celui qu'a si bien décrit Henry Poulaille [...]. Mis en condition par la télévision, la radio, la presse au service des possédants et de nos exploiteurs, les travailleurs ont perdu la conscience de classe. Ils ont perdu confiance en leur identité et leur force. » Et de rappeler la filiation logique entre Le Musée du soir et l'Association pour la promotion de la littérature ouvrière (Aplo) : « L'Aplo, née de l'initiative des mêmes animateurs convaincus de l'existence de la littérature prolétarienne et de son rôle à jouer, revendique les mêmes positions que la revue et réaffirme sa volonté de contribuer à la promotion de cette littérature prolétarienne en utilisant son site Internet. »
Le lecteur retrouvera au fil des pages les noms d'Henry Poulaille, René Bonnet, Constant Malva, Louis Lanoizelée, Michel Ragon, Jean Prugnot, Jules Mougin.
L'ouvrage est mis en vente depuis le 1er avril, par souscription. Toutefois, un exemplaire (pour l'instant), sera disponible à Publico, ainsi que des bulletins de souscription 3.

Jean-Dominique Gautel

 

1. Le Monde Libertaire n° 1748 (10-16 juillet 2014) : « De la pierre humide à Internet ».
2. www.litteratureouvriere.fr. On y trouvera l'article de Bonnet évoqué dans l'article ainsi que celui de René Berteloot.
3. Il est bien sûr possible de souscrire en ligne. Voir note 2.