L’athéisme… et puis après ?

mis en ligne le 2 avril 2015

1770AtherePourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Et qui possède la bonne réponse à cette question ? Les athées, en France en particulier, fondent leur non-croyance, ou croyance en l'inexistence de Dieu, sur la base d'une définition de Dieu qui, grosso modo, est celle enseignée par le Vatican. Les croyants ne suivent pas tous cette « bonne parole ». Tous les dieux sont-ils nuisibles ?
La non-croyance est ni plus ni moins légitime que la croyance en un dieu. La foi relève de l'irrationnel par définition, mais sommes-nous tous rationnels vingt-quatre heures par jour ? Dieu est une hypothèse, si elle est indémontrable, son contraire non plus... Excepté si l'on se réfère à des théologies selon lesquelles Dieu est à peu près synonyme de « vie » : sa contestation n'a plus d'intérêt dans ce cas. Il reste que, si on aime la vie (l'existence si vous préférez), on n'aime pas forcément l'idée de devoir la quitter un jour. C'est alors que la proposition d'un paradis post mortem est une trouvaille vraiment idéale... et elle a toujours beaucoup de succès. On a d'ailleurs vu nombre d'athées céder à l'attrait à la fin de leur vie.
En quoi le fait de croire en Dieu pose-t-il un problème ? Si cela n'engage que le croyant : suivre tel ou tel régime alimentaire, porter tel ou tel vêtement, telle ou telle coiffure, etc., pour aller au paradis ? Je dirais : « Faites-le vous-même ! Mais n'y obligez pas les autres... » Tout cela est encore assez anodin, et relève, en fait, de la superstition. Le problème est qu'il n'y a pas de dieu sans religion... Tolstoï, chrétien et anarchiste, le regrettait. Pour lui, on ne pouvait croire en Dieu que malgré l'église. Tous les croyants n'ont pas tant de recul par rapport à leur engagement. Maltraiter les femmes par exemple, les considérer comme une espèce inférieure, est une valeur commune a beaucoup de religions. En cela, elles sont sans aucun doute à l'origine des inégalités économiques et sociales qui survivent encore aujourd'hui un peu partout. Nombre de religions sont prêtes à décréter des « guerres saintes »... A-t-on encore besoin d'être athée pour contester les inégalités hommes-femmes ou les guerres dans lesquelles les religions ne sont le plus souvent que des prétextes pour encourager les troupes, les vraies motivations étant liées à des richesses naturelles privatisées ? Ne serait-ce pas en rester à de vieilles idées, géniales en leur temps, mais un peu simplistes aujourd'hui ?
Du côté des catholiques, les papes se suivent et ne sont plus guère écoutés de la plupart des croyants pour ce qui concerne les incursions archaïques dans la vie privée de tous. Le souci persistant est bien leur pouvoir de nuisance par l'intermédiaire de leur représentation nombreuse et pas toujours affichée d'emblée parmi le personnel politique à tous les postes de pouvoir possibles... Les crèches de Noël dans les lieux publics, les rapports des commissions de « bioéthique », les difficultés à « mourir dans la dignité », etc., montrent l'importance du pouvoir clérical en France.
Pour revenir à la question de l'existence ou non de Dieu, un anarchiste est aujourd'hui en droit de trouver bien faibles Les Douze Preuves de l'inexistence de Dieu de Sébastien Faure et y préférer par exemple les ouvrages de Bertrand Russell et de Michel Onfray 1. « Dieu existe », « Dieu n'existe pas »... Des affirmations qui peuvent engendrer de longues discussions, éventuellement même plaisantes, si l'on veut... Et après ? Tout cela est bien éloigné de la réalité concrète, des inégalités, du chômage, des dégradations environnementales, etc. Et puis, enfin, pour dire les choses rapidement, ce que nous apprennent des siècles d'histoire est qu'il ne faut surtout pas faire confiance aux religions pour avoir la paix civile. Et nous voyons bien, aujourd'hui, que ce n'est pas fini.
De fait, le message athée est inaudible pour un croyant. Comment admettre qu'on s'est toujours trompé ? C'est trop douloureux, il est plus confortable et surtout plus rassurant de rester dans ses certitudes et de croire que c'est l'autre qui est dans l'erreur. En outre, il est évident qu'aucun dictateur n'est capable de réduire des milliards de dissonances cognitives en claquant des doigts. A fortiori, les anarchistes, qui refusent les moyens autoritaires, n'y parviendront jamais. Et puis, encore une fois, l'être humain a le droit d'avoir des faiblesses et, ne serait-ce que de temps à autres, un besoin de « consolation ». Le réalisme est donc de constater une situation : la multiplicité des croyances, et de se demander comment faire avec.
En effet, pas un anarchiste ne peut projeter d'exterminer tous les croyants au lendemain du « grand soir ». Vivre en société, c'est faire des compromis, et pour ce qui est des croyances, la laïcité semble le moyen non seulement incontournable, mais dont la défense est de plus en plus nécessaire compte tenu du caractère belliqueux des religions, même quand elles se présentent comme chantres de la fraternité.
Nous vivons aujourd'hui dans un contexte de montée en puissance des radicalismes. En France, les catholiques pratiquants sont soumis à ce qui reste de prêtres en état d'exercer, et ce sont de plus en plus souvent des traditionalistes, des intégristes... Les musulmans, qui officiellement n'ont pas de clergé organisé, ont leurs extrémistes qui, eux, sont organisés, et de ce fait attirent vers eux nombre de personnes. Il est bien évident – qui ne l'a pas compris depuis le 7 janvier ? – que les temps sont de plus en plus durs pour la tolérance. L'humour lui-même n'est plus toléré.
Depuis des années les religieux et leurs « spécialistes de la laïcité » font un travail de communication pour redéfinir la laïcité comme un espace de tolérance pour toutes les religions, traitant ceux qui veulent maintenir la laïcité comme absence des religions dans le domaine public de passéistes, voire d'ignares. Cet espace de tolérance pour toutes les religions, c'est un espace de liberté pour les ennemis de la liberté et, en l'occurrence, nous le savons bien pour les plus radicaux d'entre eux, pour des politiciens post-fascistes dont ils sont le soutien.
Ce travail va aujourd'hui dans le sens d'une intervention de l'État pour promouvoir l'islam avec pour objectif explicite de le canaliser. C'est dans ce sens que certains veulent actuellement réformer la loi de 1905, afin d'autoriser le financement des cultes. De fait, le catholicisme est une secte qui est devenue une religion à partir du moment où l'empereur Constantin a estimé qu'elle pourrait lui être utile pour asseoir son pouvoir, et il lui a alors donné des moyens...
Cela nous promet un avenir pénible. Il faudra autre chose que « l'esprit du 11 janvier » pour ne pas en arriver là : une mobilisation ferme, laïque et antifasciste.

 



1. Sébastien Faure, Les Douze Preuves de l'inexistence de Dieu, éditions libertaires, 2008 ; Bertrand Russell, Pourquoi je ne suis pas chrétien, Lux éditeur, 2011 ; Michel Onfray, Traité d'athéologie, Grasset, 2005.




COMMENTAIRES ARCHIVÉS


La Pulga

le 22 avril 2015
Bravo !! Encore du trés bon. Les anarchistes du Monde Libertaire ne seront jamais les idiots utiles des extrémistes religieux , c'est une certitude. Certains curés froids d'extrême-gauche devraient en prendre de la graine.. Aux 3 livres cités, je ne peux, encore une fois, que recommander 2 livres de François Cavanna, "Lettre ouverte aux culs-bénits" et "Les Ecritures". Pourquoi ?? Parce qu'en plus de s'informer et se cultiver, il y a plein de moments ou on ne peut qu'exploser de rire, notamment devant la lecture du 2è livre , trés franchement. Joindre l'utile à l'agréable, c'est toujours appréciable, surtout en cette époque si sombre et morose.

Makno

le 18 novembre 2015
je vous conseille le livre de Jean Soler la violence monothéiste ed De Fallois.
Heureux sans Dieu ni religion de Michel Piquemal ed Hugo-Doc
Nourrir sont athéisme est une urgence sur une réflexion de lecture afin d'avoir des arguments valide et éfficace.

Ayant subi une éducation Catholique, je suis devenu anarchiste en constatant le coté persécuteur de cette éducation de merde aux service du capitalisme et de l'obscurantisme.Xbb24