Alain Monclus : 26 mai 1953-15 novembre 2013

mis en ligne le 19 décembre 2013
1726AlainMonclusAmi et compagnon de route de l’anarchie, Alain était devenu depuis une dizaine d’années un pilier du cercle libertaire Jean-Barrué.
Alain est, avec Flora, à l’initiative de l’émission radio « Achaïra », conçue pour s’ouvrir au monde autrement, porter et polliniser nos idéaux de liberté et de justice sociale, nos refus et nos approbations aussi.
« Achaïra » 90.10 sur la Clé des ondes, autrefois un jeudi sur deux, aujourd’hui le premier lundi du mois de 20 à 22 heures. Écoutez-là, ça continue !
Alain y tint longtemps (notamment) une chronique de littérature jeunesse d’une grande intelligence et qualité, nous faisant partager l’une de ses passions et sa façon de prendre soin de l’enfance, comme il l’aura fait toute sa vie d’instituteur.
Homme libre, humble et généreux, fidèle, tout à la fois tranquille et combatif, humainement toujours accueillant mais sans concession face notamment à la société nucléaire, l’injustice et la connerie. Il a également soutenu, accompagné jusqu’au bout la communauté rom, en particulier dans son village à Castres-Gironde.
Alain, c’est aussi, surtout, ce sourire et cette présence fraternelle d’être au monde et aux autres.
Et puis cet incroyable accent, attrapé ici et là… cette musicalité d’être, cette façon toujours chaleureuse de prononcer et d’être à l’écoute, qui faisait que l’on pouvait partager l’exil et l’amitié, rendant ainsi le monde plus habitable et vivable en sa compagnie.

Thomas

Alain, je me souviens quand tu es arrivé au cercle libertaire avec Flora. Le cercle avait encore un fonctionnement chaotique. Les gens venaient mais ne restaient pas bien longtemps.
Nous discutions alors de la nécessité de nous ouvrir à ceux qui n’étaient pas anarchistes ou même qui en avaient une idée préconçue et erronée, toujours la même : nous serions destructeurs, sectaires, violents, etc.
Avec Flora, vous nous avez proposé l’aventure d’une émission radiophonique. Je me souviens encore de cette longue nuit passée à une dizaine dans ton bureau pour concevoir et enregistrer les deux heures de l’émission zéro. Nous nous sommes alors lancés dans cette démarche de « pollinisation » des idées libertaires sur les ondes. Cela fut un travail collectif où chacune et chacun amena ses idées, ses compétences. Huit années de pollinisation radiophonique ! Tous, nous nous rappelons tes interventions : posées, travaillées, réfléchies et chaleureuses. J’ai toujours en mémoire tes chroniques de la littérature jeunesse. Celle que tu choisissais de chroniquer déconstruisait les rôles sociaux préétablis, que ce soit sur les questions de genres, de vision de l’autre ou de postures guerrières, ou bien d’autres rôles transmis. Je me souviens de ta première chronique avec Petit-Gris, ce petit tout différent car migrant ; il portait toujours sa maison sur son dos.
Mais, là encore, nous avons su par moments ne pas nous enfermer dans la radio et nous associer à divers projets : le souvenir de la Commune avec Serge Utgé-Royo pour ses Contre-chants ; avec Claire Auzias pour Louise Michel ; Lou Marin pour Albert Camus et les libertaires ; la décroissance avec Jean-Pierre Tertrais ; les anarchistes israéliens et la colonisation de la Palestine avec Guy Davidi, etc.
Tu t’étais aussi engagé avec intransigeance contre la société nucléaire ; et, le 15 octobre 2011, tu as pris la parole place Pey-Berland pour le cercle. Tu y dénonçais les manœuvres politicardes qui ont amené le mouvement antinucléaire français à tergiverser sur la sortie du nucléaire qui à défaut d’être immédiate devient de plus en plus hypothétique.
Un autre de tes engagements a été le soutien aux Roms, population toujours plus malmenée dans notre pays, bouc émissaire pour détourner la colère des victimes de la crise.
Comme pour beaucoup de membres du cercle, la Zone à défendre contre le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes a été le symbole d’une résistance. Cette mise en œuvre d’alternatives pour tenter de vivre au quotidien la société voulue est emblématique de ce que nous voulons, nous anarchistes. Ce combat s’inscrit bien dans l’optique de désobéissance civile et d’action directe non-violente qui éclaire la pensée du cercle. Tu t’es donc engagé dans le collectif Sud-Gironde de soutien à la ZAD.
Un dernier mot pour dire qu’avec Flora, vous aviez accueilli chez vous les rencontres pour le projet de regroupement des membres de la Fédération anarchiste au sein d’une union régionale Centre-Ouest, alors que tu sentais déjà les premiers symptômes de ton mal.
Alain, nous garderons vivant en nous ton sourire, ta chaleur ; ils continueront à alimenter nos réunions conviviales avec l’envie de poursuivre avec Flora tes combats dans la voie d’ouverture que tu as voulu tracer.

Philo