L’école au rythme des réformes

mis en ligne le 11 décembre 2013
1725EducationLes espoirs placés par les enseignants et les enseignantes dans le changement de gouvernement n’auront vécu qu’un temps. Certes, on en a fini avec l’arrogance sarkozienne des petits chefs, certes les Espe (écoles supérieures du professorat et de l’éducation) viennent remplacer les IUFM supprimés par la droite – mais dans quelles conditions et tout cela en lien avec la réforme des universités placées sous le potentat de barons locaux –, certes des créations de postes sont annoncées, une énième refonte des programmes est en cours de réflexion, ainsi qu’une redéfinition du métier d’enseignant… mais dans les applications concrètes, on est très loin du compte. Les conditions de travail des enseignants ne se sont pas améliorées. On leur en demande toujours plus sans revalorisation salariale, notamment dans le premier degré (enseignement primaire).
À tous ces sujets s’ajoute désormais la question des rythmes scolaires. Cette réforme, annoncée en grande pompe, ne change pas fondamentalement les choses, pire elle alourdit les semaines, apporte de la fatigue supplémentaire et désorganise les services.

En théorie
Dans l’idée, il s’agit d’ajouter trois heures de cours le mercredi matin afin d’alléger les autres jours de la semaine et d’assurer une pause méridienne assez longue. Les associations, les services municipaux sont mis à contribution pour assurer ces trois heures par semaine sous forme d’ATP (activités de temps périscolaire). Les enseignants, eux, continuent à devoir assurer une heure d’aide par semaine (APC : activités pédagogiques complémentaires). Ces activités viennent remplacer les « aides personnalisées » qui étaient, en fait, du temps d’école rajouté aux élèves en difficulté et qui a contribué à la suppression des postes d’aide spécialisée (Rased : réseaux d’aide et de soutien aux élèves en difficulté) qui n’ont toujours pas été recréés.

En pratique
Dans les faits, les ATP se découpent souvent en trois fois une heure (ou quatre fois quarante-cinq minutes, autant dire rien puisqu’il faut compter les temps de trajet, d’installation et d’entrée dans les activités). Comme les heures de surveillance de cantine, il s’agit de temps de travail haché. L’heure d’APC s’ajoute à cette architecture et, du coup, les cours s’arrêtent à 15 h 30. Ils sont alors suivis d’une heure d’ATP ou d’APC. Bref, cela ne change rien à la semaine des enfants, mis à part le fait qu’ils doivent se lever une matinée de plus.
D’autres problèmes concrets s’ajoutent à cela : les transports, la cantine et le manque de locaux. En effet, les enseignants de primaire ne partent pas à la fin de la classe. Ils rangent leurs affaires, préparent la journée du lendemain, préparent des affichages, modifient la disposition de la classe, etc. Du coup, où se déroulent les activités périscolaires ? Dans un premier temps, elles étaient envisagées au sein de l’école, mais on voit que c’est compliqué, d’autant plus que les règles d’encadrement des enfants, même assouplies, ne sont pas les mêmes : un animateur pour quatorze enfants pour les moins de 6 ans (au lieu d’un animateur pour dix normalement) et un animateur pour dix-huit enfants pour les plus de 6 ans (au lieu d’un animateur pour quatorze normalement).
En fait, la réforme des rythmes scolaires est davantage un empilement des temps scolaires, périscolaires, complémentaires… Les choses s’ajoutent les unes aux autres en compliquant la vie des enfants, des parents, des enseignants.
Là encore, c’est une réforme qui se fait contre les personnes directement concernées, comme si une réforme devait toujours se faire contre les enseignants.

Du côté des enfants
Et concernant les enfants ? Tout le monde s’accorde à dire qu’ils sont plus fatigués. Avoir cours le mercredi matin ne relève pas du même niveau de concentration et d’activité que les divers clubs et centres de loisirs. De plus, il y a une course à l’échalote concernant les activités périscolaires. Les parents imaginaient des activités extraordinaires, en fait, il s’agit d’activités diverses, mais tout à fait ordinaires (jeux collectifs, jeux de société, sport, bibliothèque, etc.). Outre la question des locaux, il y a aussi la question de la gestion des temps collectifs, de l’encadrement.
Le débat se cristallise sur la maternelle. En effet, les gouvernements précédents ont eu tendance à transformer les classes maternelles en « classes prépa » du CP, ne laissant pas le temps aux enfants de se développer à leur rythme.
De plus, les fermetures de classe et la suppression des classes de tout-petits ont ajouté de la difficulté et de l’exclusion. Que les enfants aient 3 ans ou 12 ans, ils ont le même temps de présence à l’école. Une vraie réflexion doit être engagée sur ce sujet et d’autres, mais la volonté gouvernementale n’est pas celle-là.

Au rythme des grèves
Du coup, le 14 novembre et le 5 décembre, les enseignants, les agents et les fonctionnaires territoriaux étaient en grève et ont manifesté massivement. Ces grèves s’ajoutent à celles des personnels périscolaires. Pour toute réponse, Vincent Peillon prétend, d’une part, annualiser les obligations de service des enseignants du primaire assurant des fonctions de remplacement ou exerçant sur des postes fractionnés et, d’autre part, élargir l’abaissement des taux d’encadrement à l’ensemble des activités extrascolaires. Les personnels et les élèves devraient donc faire les frais de la réforme. La réforme des rythmes, mise en place à la rentrée 2013 pour un peu plus de 20 % des écoliers, fait apparaître de grandes difficultés. Déjà de nombreuses communes annoncent leur refus de la mettre en place en 2014. D’autres reviennent en arrière afin d’avoir plus de temps pour y réfléchir. En faisant glisser les missions d’enseignement de l’Éducation nationale vers les communes, elle crée de graves inégalités de traitement sur le territoire et crée une confusion entre scolaire et périscolaire (locaux, activités…). Elle va à l’encontre de l’intérêt des élèves et de celui de l’ensemble des acteurs concernés.
Il est temps que les libertaires, fortement impliqués dans les mouvements d’éducation, fassent entendre leur voix et leurs propositions. Celles-ci peuvent se construire dans les diverses organisations syndicales ou associatives, mais une apparition claire d’un front de lutte anarchiste se fait de plus en plus sentir, de la maternelle à l’université, en passant par la formation professionnelle, les activités de loisirs, etc.
La lutte continue.



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


nervousbreakdown

le 11 décembre 2013
Je vous signale une erreur, travaillant en accueil de loisirs, je tiens à signaler que le taux d'encadrement est de 8 enfants par animateurs chez les moins de 6 ans et 12 par la suite.