Pétrochimie : Kem One en péril

mis en ligne le 11 avril 2013
C’est certes un redressement, mais judiciaire et pas productif. Lundi 25 mars, le pôle vinylique Kem One, dont la production sert notamment à la fabrication de PVC, a été placé en redressement judiciaire suite à cessation de paiement. Ignorant les mises en garde syndicales sur le danger de la démarche, Arkéma avait cédé cette branche en juillet 2012, pour un euro symbolique, à l’homme d’affaires nord-américain Gary Klesch, tout en épongeant 587 millions d’euros de pertes et en fournissant 98 millions de trésorerie. Une opération saluée en bourse comme il se doit. Klesch, qui n’a jamais gardé une entreprise plus de quatre ans, a utilisé les installations pour s’enrichir, fragiliser l’activité et piller la trésorerie sans investir quoi que ce soit.
1 800 salariés sont concernés en France. Si, selon la CGT, le paiement des salaires est garanti lors de la procédure de redressement judiciaire, le sort de l’entreprise reste très incertain. Gary Klesch ne veut conserver que l’aval de la production, entraînant un morcellement des activités dénoncé par les syndicats. Pendant une période de trois à dix-huit mois, deux administrateurs et un expert vont se pencher sur les comptes opaques de la société et tenter de trouver une solution viable pour les usines. Le maire communiste de Martigues appelle à une nationalisation temporaire. Fin novembre 2012, pour ArcellorMittal, Arnaud Montebourg s’était fait rembarrer avec une telle proposition. La CGT souhaite mettre Arkéma et Total devant leurs responsabilités et propose une filialisation de l’entreprise au sein du groupe Total.
Dans la région, Kem One dispose de deux installations à Lavéra et à Fos (615 personnes). Mais les travailleurs provençaux de la chimie craignent un effet domino en raison de l’interdépendance de l’ensemble des unités de production alimentées par le principal port européen de livraison pétrolière à Fos. Entre 17 000 et 35 000 travailleurs sont potentiellement menacés. La CGT et FO ne prévoient pas de mettre à l’arrêt les installations afin de montrer que les travailleurs veulent continuer à produire tant qu’ils en auront la possibilité. La grève est donc exclue pour l’instant. FO a effectué un blocage symbolique de l’usine, lundi 25 mars. Suite à une AG réunie le 26 mars, l’intersyndicale a demandé le départ de Gary Klesch.
Au moment de la cession par Arkéma, une polémique avait opposé l’émission « Là-bas si j’y suis », le journal Fakir et le collectif Pièces et Main d’œuvre au sujet des nuisances qu’entraîne la production de Kem One 1. Le cœur du débat opposait les pro-industrie défendant l’emploi à tout prix et les anti-industriels pour qui « nos vies valent plus que nos emplois ».

Groupe Orwell de la Fédération anarchiste, Martigues







1. Un livre retrace cette controverse : Métro, boulot, chimio. Débats autour du cancer industriel, Le Monde à l’envers, 2012.