Post-hits (3)

mis en ligne le 7 février 2013
Dans Le postanarchisme expliqué à ma grand-mère, Michel Onfray oppose à la révolution et aux promesses de sociétés radieuses l’anarchie positive. « L’anarchie positive, c’est ce qui, dans le corpus anarchiste, ne relève pas de la critique, de la négativité, de la déconstruction, du ressentiment, d’un désir de vengeance, d’une soif de haine, d’une envie de rancune (Nietzche a superbement analysé ce mécanisme à l’œuvre dans l’engagement des socialistes, des communistes, des anarchistes…) ».
Je n’ai pas lu ce passage de Nietzche, mais je peux reconnaître des types de militants à l’agressivité débordante, déséquilibrés, au sens premier, qui font plus de mal que de bien aux idées qu’ils défendent. La forme est ici en contradiction avec le fond. « Demoiselles d’Avignon » politiques, ces militants sont des repoussoirs. D’autant plus que leur haine a la fâcheuse manie d’être prioritairement tournée vers leurs proches, attisant luttes d’egos, scissions et tout l’tsoin-tsoin au sein des organisations politiques. Onfray a subi plus d’une fois les effets de cette agressivité, au sein du milieu anar.
(Si j’osai, je dirai qu’il manque parfois une pincée de christianisme dans notre anarchisme ? Oh la provoc !) Plus généralement, notre propagande est trop souvent le reflet de cette négativité et modèle l’image que nous donnons collectivement de nous-mêmes.
On peut poursuivre : et parler du calcul, ou des ressorts inconscients qui animent ceux qui ont des comptes à régler, des places à prendre. Ceux qui profitent des luttes collectives pour améliorer leur situation matérielle individuelle, ceux que la direction des luttes rend odieux, ceux qui s’érigent en nouveaux maîtres, pires parfois que ceux qu’ils ont renversés. Tout cela existe bel et bien, c’est malsain, et il est politiquement crucial d’y réfléchir constamment. Pour moi, le combat essentiel (son essence) de l’anarchisme est là… à tout moment, mais aussi et surtout, lors des révolutions ! Parce que, telle qu’énoncée dans le livre d’Onfray, cette opposition « anarchie positive/révolution » semble écarter la seconde au profit de la première (?). Mais les révolutions surviennent, point. Du moins, les révoltes. Et plus d’un protagoniste a alors en lui ce « désir de vengeance ». C’est souvent le moteur même de la révolte, non ? Et le pari n’est-il pas de « sublimer » cette énergie négative en positivité ? Ce serait cela, être révolutionnaire. (Ce n’est pas mal dit, mais ce ne sont que des phrases. Quand je vois déjà la difficulté à calmer une bagarre entre deux gamins…). Pour parler clair, j’ai perdu ma fascination pour la Révolution, je n’en vante plus les mérites, je m’en méfie, j’ai des craintes, rétro et prospectives, mais je ne l’évacue pas. Michel Onfray conclut : « Si révolution il y a, elle ne se fera plus par le haut, dans la violence, avec le sang et la terreur, imposée par le bras armé d’une avant-garde sans foi ni loi mais par le bas, de façon immanente, contractuelle, capillaire, rhizomique, exemplaire. » Cela m’apparaît à la fois désirable, très présomptueux, et contradictoire. Car, et il l’écrit lui-même « le monde n’est pas fait de concepts mais de forces qui résistent, de flux de violences déraisonnables, de passions irrationnelles, d’individus conduits par leurs pulsions… » J’ai la nette impression que dans nos sociétés riches, pacifiées par des décennies de consommation, nous ne mesurons plus ce qui peut advenir de violence collective…
La semaine prochaine je reviendrai sur « l’anarchie positive », que j’estime en effet nécessaire d’activer en nous, mais avant cela (et j’avais déjà tiqué là-dessus lors de l’écoute d’une conférence à l’Université populaire de Caen) : « Le capitalisme constitue la vérité indépassable de l’échange depuis que le monde est monde, car l’on confond souvent capitalisme, un mode de production des richesses qui suppose la propriété privée, et libéralisme, un mode de répartition des richesses ainsi obtenues. » Non ! Si l’échange est bien présent chez les humains depuis la nuit des temps, ce n’est pas pour autant du capitalisme ! La propriété privée existait avant le capitalisme. C’est se brouiller l’esprit que de ne pas différencier les modes de productions historiques. Sinon comment expliquer les temps modernes, les révolutions bourgeoises et industrielles ? Quant au libéralisme, c’est une théorie, une idéologie ! Le fascisme en est une autre, qui sauvegarda toutefois les intérêts capitalistes… Le postmoderne oublie de quoi il est le post ? N’ajoutons pas encore plus de confusion au grand bazar idéologique actuel, sous prétexte de po-si-ti-ver. À moins ? À moins que le postanarchisme ne soit un cheval de Troie ? L’autre nom d’un réformisme avancé. Ce qui expliquerait aussi l’idée de « capitalisme libertaire ». Dans ce cas discutons-en.

« Autour de moi y a une usine,
c’est une gigantesque machine à fabriquer des impostures des postulats de filousophes et des artistes post-classiques prédicateurs a postériori les politiques apostasies ont aposté les post-fascistes ! Post ! Post ! Post ! Post ! »