PSA, Virgin… La fraternité ouvrière face aux patrons, aux jaunes et à l’État

mis en ligne le 6 février 2013
1696VirginPSA : de demi-victoires en demi-victoires
Lundi 28 janvier, après dix jours de lock-out, et malgré la présence de dizaines de vigiles et de briseurs de grève venus d’autres sites (plus de 200 cadres), les ouvriers grévistes de l’usine PSA d’Aulnay ont réoccupé leur lieu de travail et stoppé la quasi-totalité de la production. De quoi donner des boutons à la direction et aux syndicats jaunes (SIA et FO en tête) qui, pour désamorcer le mouvement social en cours, ont désormais recours à la sûreté départementale de Bobigny : cinq militants ont en effet été convoqués et quatre d’entre eux ont été mis à pied avec licenciement potentiel à la clé… Des pratiques cyniques qui ne parviennent toutefois pas à affaiblir la grève. D’autant que, mardi 29 janvier, la cour d’appel de Paris a ordonné la « suspension de la restructuration » engagée à PSA (restructuration qui, rappelons-le, repose sur la suppression de 8 000 postes). Les raisons ? À Faurecia, la direction n’aurait pas informé les institutions représentatives du personnel du contenu du plan social, obligation pourtant inscrite noir sur blanc dans le Code du travail. Car Faurecia, équipementier et fournisseur de l’industrie automobile, est à 57 % une filiale de PSA et sera donc inévitablement touché par l’implacable plan de restructuration voulu par la direction Peugeot. À ce sujet, Thérèse Le Cocq, de la CGT Faurecia, déclare : « Depuis des mois, les avocats de PSA et Faurecia n’arrêtent pas de dire qu’il n’y avait pas de lien entre les deux entités. Cette décision de justice est bien la preuve du contraire. » À Aulnay, si la nouvelle a été accueillie avec joie, la réserve a cependant vite repris le dessus, et pour cause : cette première victoire en demi-teinte ne remet pas en cause la fermeture du site dionysien prévue pour 2014. Même si Jean-Pierre Mercier, de la CGT, pense désormais que les travailleurs ont « de quoi obliger la direction à repartir sur de vraies négociations, sur la base des revendications des salariés », il n’empêche que la suspension du plan de restructuration ne repose que sur un vice de forme et que le plan social en tant que tel, s’il prend un peu de retard, n’est pas contesté par la justice. Les salariés de l’usine ont bien conscience de cette demi-victoire et comptent utiliser le temps gagné pour consolider leur combat.

Virgin : mobilisation contre la liquidation
Mercredi 9 janvier, la célèbre chaîne de biens culturels déposait le bilan et, le lundi suivant, le tribunal de commerce de Paris la plaçait en redressement judiciaire, avec une période d’observation de quatre mois avant de décréter une éventuelle liquidation. Depuis, la crainte d’un plan de « sauvegarde » de l’emploi plane au-dessus des salariés de l’enseigne qui n’ont pas attendu pour se mobiliser afin d’obliger la direction à chercher un repreneur et l’État socialiste à intervenir pour sauver leurs emplois. Mardi 29 janvier, des salariés venus d’Avignon, Bayonne, Dunkerque, Marseille, Lyon, Nice, Plan-de-Campagne, Rennes, Montpellier et Rouen ont ainsi rejoint ceux d’Île-de-France pour une manifestation monstre (environ 500 personnes) dans les rues de Paris, « la plus grosse de toute l’histoire de Virgin » à en croire la CGT. Répondant à une fraternité ouvrière qu’on aurait pu croire oubliée en ces temps postmodernes, des travailleurs de PSA, de Sanofi et de Candia se sont également joints au cortège. Après un petit défilé sur le pavé parisien, une délégation a été reçue par Butler qui, au bout de deux heures, s’est engagé à « garantir aux salariés des dispositions plus favorables que celles de la convention collective ». Une promesse qui n’engage à rien, d’autant que le grand patron – qui n’en est pas à son premier échec en matière d’entreprenariat – n’a rien chiffré. Les salariés restent donc mobilisés et continuent à entretenir et à tisser des liens avec les autres travailleurs d’entreprises sujettes, elles aussi, à des plans sociaux.

En route vers l’unité ?
PSA et Virgin ne sont que deux boîtes en lutte parmi beaucoup d’autres dans le monde du travail. La crise, qui ne cesse d’avoir bon dos pour le patronat, n’en finit plus de justifier les licenciements et la casse du droit du travail. Mais, bien que le chômage et la précarité se généralisent, le gouvernement, si revendicatif il y a quelques mois en pleine campagne électorale et quand il n’était encore que candidat, ne fait rien d’autre que se tourner les pouces. Et que dire des directions des grandes centrales syndicales qui se bornent à cultiver le refus de l’unité, qui s’engluent dans des querelles de pouvoir internes, quand, pour certaines d’entre elles (CFDT, CGC, etc.), elles ne servent pas la soupe à l’État prétendu socialiste ? Heureusement, de tout ce merdier émergent quelques espoirs, notamment celui de voir resurgir du cœur des luttes une solidarité interprofessionnelle dont les pontes syndicaux devraient s’inspirer pour, à défaut de dégager, redonner le ton d’un mouvement social combatif et uni.