Un peintre anarchiste disparaît

mis en ligne le 24 mai 2012
Fidèle ami de Radio Libertaire, le peintre Jean Dassonval, en mars 2012, sans tambour ni trompette, passait l’arme à gauche. Tout au long de cette aventure commune entre deux créateurs, une radio et un peintre, les relations et les échanges furent vivants et chaleureux.
D’un coté, Jean, avec ses images insolentes et « parlantes ». De l’autre « Chronique Hebdo », sur Radio libertaire, une émission chargée de la critique sociale anarchiste de l’actualité.
Plus que cela, Jean était un ami personnel, mon ami. Il m’entrainait au musée pour m’apprendre à regarder, un tableau. Un jour, c’était Max Beckman, peintre allemand aux images expressionnistes sombres et tragiques. Une autre fois, c’était Picabia et son insolence sarcastique, critique de tout dogme. Moi, qui, comme l’avouait Proudhon de lui-même, n’avait pas une sensibilité artistique très développée, j’écoutais Jean me raconter l’histoire du tableau ou du peintre et la richesse imaginaire de la création. En contrepartie, j’essayais de lui faire lire le bouquin de Proudhon sur La Destination sociale de l’art. Succès pas assuré ! Après cette balade dans les reflets du réel et de l’idéal, nous allions sacrifier à la « dive bouteille » et nous régaler, à l’autre bout du parc surplombant les entrailles de Beaubourg, à La Cloche des Halles, rue du Coq-Héron.
Mais, en ces temps d’adolescence de Radio libertaire, il fallait assurer non seulement les arrières mais le futur. Et nous n’étions pas seuls, Jean et moi. Un groupe de la Fédération anarchiste baptisé en ces temps de crise bovine « La Vache folle » organisait des réunions « exposition-vente » des tableaux de tous nos amis peintres, dont Jean faisait partie. Il y avait, et j’en oublie sûrement, Dassonval, Pouppeville, Livartowsky, Liejs, Bahvsar, Thomas Roudeix, et bien d’autres. Et ces séances, où nos amis peintres exposaient leurs œuvres, attiraient le chaland, souvent ami. Le produit des ventes allait à la radio.
Alors, Jean, c’était la belle époque. Quelle idée tu as eu de nous faire faux bond, de prendre la tangente, de passer l’arme à gauche. Cette arme bienveillante et généreuse qui était ton pinceau enveloppé dans ton humour souriant. Allez, Jean, ne te tracasse pas. Tu es toujours avec nous. Salut.

Jacques, dit Archibald Zurvan
Groupe anarchiste La Vache folle