Chronique néphrétique

mis en ligne le 22 septembre 2011
J’ai une bonne nouvelle : je sais pour qui je vais voter à la prochaine présidentielle !
Bien sûr je n’aurai jamais voté pour un ou une de ceux qui fricotent aux marches du Palais depuis des décennies, ex-ministre dans un quelconque gouvernement de droite ou de gauche. Je n’aurais pas voté non plus pour un individu trempé jusqu’au cou dans de sombres affaires de pot-de-vin, d’enveloppes en liquide ou de valises avec fonds. Pas pour une vile pine, ni une cul-bénit, non plus pour un qui appellerait « tonton » un dictateur africain… Je sais, ça limite sacrément le choix.
Mais, justement, je n’ai pas choisi. Il m’est tombé dessus comme une évidence ! D’ailleurs, lisez comme il parle des élections : « Que les idées s’incarnent ponctuellement dans un contexte social et politique déterminé, ou qu’il faille déléguer la tâche militante de la représentation publique, par un mandat précis et limité dans le temps, est une chose. Jouer des ambiguïtés du système politique et médiatique pour se substituer à l’action militante réelle au sein de la lutte de classe, en est une autre. Nous commencerions involontairement à nous intégrer dans le décor politique traditionnel en incrustant notre mouvement et nos idées dans la case candidat rituel à l’élection présidentielle de notre téléviseur. C’est risquer, à terme, de nous transformer en caricature de nous-mêmes, voire en alibi du système. » Bien vu, non ?
Alors, c’est décidé aux prochaines présidentielles, je vote Besancenot.
Trop tard ? Il ne se présente plus ? Parce qu’en plus il fait ce qu’il a dit ? Il quitte son poste en pleine célébrité, connu et reconnu dans la rue, et même pas à cause d’un scandale ou d’une malversation quelconque ? Il quitte la piste, loin d’avoir dépassé la limite d’âge, et sans avoir battu le record de candidatures d’Arlette ? Bravo !
Trop tard ? Mais non ! C’est maintenant, au contraire, qu’il faut marquer le coup ! Je sais, peut-être que mon bulletin ne sera pas comptabilisé, noyé dans la masse de ceux qui voteront de Gaulle ou Léon Blum, mais je prends le risque ! Voici un ex-candidat qui se sent « libéré » d’une personnalisation qui lui pesait, qui, en renonçant à une troisième élection, « se sent en paix avec ses convictions politiques profondes », faut l’encourager ! Donc : pas trop tard ! Pas trop tard peut-être pour comprendre, nulle part ailleurs mieux qu’au NPA, mais ailleurs aussi, que la présidentielle, on pourrait même dire la présidentialisation, rend bête et méchant (paraît que c’est la haine désormais entre « opposants à l’institutionnalisation » et « opposants au sectarisme »). Même chez les révolutionnaires, même dans une organisation qui n’a aucune chance de voir son candidat élu, la présidentielle rend marteau… Pour qui connait l’ex-LCR, l’évolution semblait inéluctable : les « opposants au sectarisme », partisans de l’unité à la gauche de la gauche rejoignent le Parti communiste et Mélenchon. Et les autres semblent vouloir sauver leur âme, dans une position dite « de repli autarcique et révolutionnariste » par leurs détracteurs, après avoir été applaudis sur les mêmes tribunes que les dirigeants du Front de gauche.
Nous aurions tort de seulement sourire d’une telle situation, car nombre des questions posées dans leurs débats virulents, se posent à nous-mêmes, anarchistes.
Peut-on propager des idées, peut-on peser sur la vie politique actuelle sans se présenter aux élections ? Nous répondons : « oui » ? Dans ce cas, quelles formes efficaces ce travail militant doit-il adopter ? « Efficaces » implique que nous obtenions des résultats probants, chiffrables ou matérialisés en nombre de militants ou en réel impact politique… Vouloir s’organiser, lutter avec d’autres, sans sectarisme, en acceptant les différences, est-ce possible (pour nous) ? Peut-on le faire sans arrière-pensée électoraliste, sans être amené à négocier sa « part de marché militant » en places sur des listes, en postes à pourvoir ? Nous en sommes persuadés. Prouvons-le aux autres, de manière visible, et cette attitude exemplaire nous garantira une influence sans commune mesure avec une candidature à la présidentielle.