Rentrez vos poules sarcelloises

mis en ligne le 24 février 2011
Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? Après La Tunisie, après l’Égypte, à qui le tour ? Laissant les envoyés spéciaux du Monde libertaire, lesquels au Yémen, en Lybie ou encore en le beau royaume de Bahreïn nous narrent – et avec quel talent ! – les soubresauts et embrasements d’une rue qui, quoi qu’on en dise, gouverne, les laissant donc, ces camarades dont on vante trop peu le courage et la finesse d’analyse, couvrir au plus près ces sujets épineux s’il en est, l’autruche préfère, ici, parler de tout autre chose. De la Berlu, tiens, ça fait longtemps. Il cavaliere a beau se dire « absolument pas préoccupé » par le procès qui l’attend aux premiers jours d’avril, n’empêche : voilà un pays, l’Italie, où le président du Conseil toujours en exercice est traduit devant la justice. Pendant ce temps, de l’autre côté des Alpes, tout est fait afin d’éviter au citoyen Chirac, en retraite depuis 2007, une comparution jugée par d’aucuns infamante ; il semble par ailleurs, pour le pouvoir en place, impossible ne serait-ce que d’envisager la démission d’une ministre aux affaires étranges, tant la fréquentation des dictatures, de ses palais, continue d’aller de soi et ne pas émouvoir grand monde. Comme le susurrait Sarko lors de son show télé à plaisanteries multiples, tout porte à croire que, dans ce pays, « tout n’est pas en abscisse et en ordonnée ». Tu parles, chacal ! Tes abscisses sont autant d’abcès, de pustules pullulant sur le corps social, exemple récent : la Sécu. Future victime du programme de casse systématique des acquis, c’est par la bande que Sarko et ses potes mafiosi s’attaquent à cette citadelle, usant jusqu’à la corde du prétexte de la dépendance, surtout, de son financement. Bien entendu, comme d’habitude, les caisses sont atrocement vides. Sarko, économiste en diable, demande donc « à chacun d’entre vous d’examiner toutes les autres options possibles, y compris celle de l’assurance ». Privée, l’assurance, ça va de soi. La création de la désormais célèbre cinquième branche, livrée d’emblée aux assureurs, risque bien d’être le premier coin enfoncé au cœur du principe de solidarité. Mais pourquoi ne pas privatiser dans le même mouvement l’assurance maladie, l’assurance vieillesse… ? Pas d’impatience : ça viendra.
Quelle que soit la façon que choisiront ces aigrefins pour nous la mettre grave, certains de nos contemporains n’auront guère le loisir d’en supporter les conséquences. Au hasard : les Roms. Une double page dans la presse livre un constat sans concession : non seulement les expulsions n’ont pas chassé les Roms de France, dont le nombre reste à peu près stable, mais surtout les conditions de vie de ceux et celles y résidant se sont largement dégradées. Belle réussite, y’a pas à dire. Variable d’ajustement de la politique migratoire (les Roms constituent plus du tiers des reconduites à la frontière), on en use pour gonfler les chiffres, sans se soucier des conséquences. « Oui, il faut expulser les Roms », s’emporte ainsi Jacques Myard, député UMP. « Expulser permet de rappeler à ces gens qu’ils ont le droit de venir, mais pas de s’établir en France. » Le droit de jouer les touristes, quoi. Pour l’heure, ces « touristes »-là survivent dans d’immenses bidonvilles, tel celui de Sarcelles, dans le 95, qui compte un millier d’habitants et… un unique point d’eau, une borne d’incendie, à l’entrée du campement. Et c’est sans compter les déchets qui s’entassent entre les baraques, comme personne ne vient les ramasser (pas une benne à l’horizon). À Sarcelles, les riverains seraient, parait-il, exaspérés. « Il y a un vrai risque pour notre santé », se lamente l’un d’eux. Et tes poules, tu as pensé au moins à les rentrer ?