Alors, on continue ?

mis en ligne le 14 octobre 2010
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Vous savez que c’est parfois compliqué d’écrire un article pour Le Monde libertaire, déjà qu’on n’est pas plus payé qu’à CQFD (mais c’est toujours pour la bonne cause), en plus il faut jouer à Madame Irma. D’autant que vous, lecteurs et lectrices, avez des informations que je n’ai pas puisque vous ouvrez votre hebdomadaire préféré au plus tôt le 14 octobre et que, moi, je dois vous écrire ce papier pour le 8. Vous avouerez que c’est pas toujours facile de se bagarrer pour une révolution sociale et libertaire et pour une société sans classe ni État.
Bref. À l’heure où j’écris, donc, et faisant fi de leurs secrétaires et représentants nationaux et confédéraux, des syndicats, des unions locales ou départementales et des coordinations syndicales appellent à la reconductibilité de la grève contre la réforme des retraites à partir du 12. Il ne s’agit pas tout à fait d’un appel à la grève générale (cela entraînerait d’autres formes plus offensives) mais ça permet de continuer le mouvement. Tout le monde le sait, et a pu le vérifier, les journées d’action à répétition et à saute-mouton, ça ne sert à rien. Juste à se retrouver ensemble et à être contents d’être si nombreux. Après… Rien.
Les syndicats de la RATP ont été les premiers à appeler à reconduire (l’Unsa s’est retirée) et dans la plupart des transports urbains la CGT appelle à prolonger le mouvement jusqu’au 30 octobre. Dans les ports et docks, dans les transports, il en va de même. À la SNCF, même la CFDT s’est jointe aux autres syndicats pour appeler à des assemblées générales après le 12 et à reconduire le mouvement. Dans l’énergie, la CGT appelle à reconduire. Dans la Fonction publique, un préavis de grève a été déposé jusqu’au 18 octobre.
Au niveau du privé, la chimie semble également bien partie. Déjà après la journée du 23 septembre, des installations ont continué le mouvement 24 à 48 heures supplémentaires. La Fédération chimie CGT, qui tient son congrès du 11 au 15, a suivi l’appel de la coordination des syndicats CGT de Total pour reconduire le mouvement. Chez Arkema et Rhodia, qui s’étaient bagarré pour la reconnaissance de la pénibilité du travail posté dans des atmosphères chimiques et qui avaient obtenu un départ en retraite anticipée, là aussi la CGT (très majoritaire) appelle à la reconduction dès le 13 au matin, parce qu’il est hors de question d’« échanger les meilleures années de retraite contre les pires années de travail ».
Même Bernard Thibault se sent obligé d’envoyer à chaque militant un message appelant « à généraliser la tenue d’assemblées générales, de consultations sur les lieux de travail pour définir ensemble et démocratiquement les revendications, le rythme, les formes et les modalités de la reconduction de l’action après le 12 octobre ».
C’est une info pour personne, au niveau de la CFDT, on est plus timoré et, au moins au niveau chimie, il n’est appelé qu’à participer aux manifestations et même pas à arrêter les installations. Ce syndicat dit que c’est le nombre de manifestants qui sera déterminant et surtout « qu’il ne faut pas laisser la mainmise à la radicalisation voulue par le gouvernement pour diviser les Français à l’approche de l’élection présidentielle » (vous avez bien lu). C’est quasiment mot pour mot ce que dit le numéro deux de la CFDT, Marcel Grignard. Une façon de se distancier de mouvements de grèves au-delà du 12 et signer. Mais qu’attendre de ces gens-là ?
En même temps, il y a Marseille qui est à la pointe de la lutte sociale, des agents du port au personnel des cantines, des fonctionnaires des impôts aux enseignants, des infirmières de l’hôpital St-Joseph aux caissières de Monoprix. Ça bouge donc et c’est plutôt enthousiasmant.
Nul doute que la journée d’action du 12 aura été très suivie mais s’il n’y a pas une véritable offensive, on ne fera pas reculer le gouvernement et les syndicats timorés mordront à l’hameçon gouvernemental et signeront.
Sarkozy et sa bande veulent montrer qu’ils sont les bons petits élèves des marchés financiers. S’attaquer aux retraites n’est que le début, ils ont encore plein de projets.
Alors voilà, je ne sais pas où en est arrivé le mouvement social aujourd’hui, alors que vous lisez ces lignes mais si le pays se met à ressembler à la Guadeloupe de l’an dernier, en grève générale, ou à Athènes en insurrection, ça serait vachement bien.