Rentrée sociale des maussades

mis en ligne le 17 septembre 2009
La rentrée sociale, oui on y croit. « La rentrée qui bouge » affiche même la CGT sans rire. En fait, si on s’en réfère à la presse, la rentrée a eu lieu fin août lorsque Bernard Thibault est venu parader (comme chaque année) à l’université d’été de la CFDT et jouer les duettistes avec Chérèque. Ils ont fait les clowns et ont tenu des discours quasi-similaires. Qui s’en étonne encore aujourd’hui ? Les deux secrétaires syndicaux étant très proches depuis la réforme sur la représentativité syndicale. D’ailleurs plus ça va et moins on voit de différences entre les propos des deux secrétaires syndicaux.
Depuis, Bernard Thibault ne semble pas avare en prises de parole et en interviews. Il a trouvé le moyen, dans le JDD, de ne citer comme référence que Sarkozy, qu’il voit souvent (7 fois depuis janvier), et on apprend même qu’il a soufflé à Sarko l’idée d’états généraux de l’industrie. Thibault disant que « les salariés ne doivent pas considérer l’économie comme un domaine réservé aux experts » mais qu’ils doivent faire des propositions pour relancer l’industrie (il n’est évidemment pas question d’autogestion ou de remises en cause de la croissance).
Bernard Thibault, en dix ans de secrétariat général, à trop côtoyer les ministres et surtout l’Élysée, a une vision bureaucratique du monde et du mouvement social. Il est bien plus souvent dans les ministères qu’auprès des salariés en bagarre et s’il est allé auprès des grévistes de Molex c’est que ça commence à se voir.
Il n’y a pas que le boss de la CGT qui se cédétise. En lisant la déclaration de l’UD de l’Oise en soutien aux Conti, on n’est pas déçu : « La CGT réaffirme son soutien aux salariés de Continental et à tous ceux qui luttent pour le maintien et le développement de leur emploi (jusque là ça va). Elle entend construire avec eux un rapport de force permettant enfin d’obtenir pour leurs représentants des droits d’interventions sur les choix stratégiques des entreprises. » Vous avez bien lu, il ne s’agit pas de construire dans la lutte tous ensemble un rapport de forces pour empêcher les licenciements, non, il s’agit de demander plus de pouvoirs pour les élus, les experts et les bureaucrates. Et vouloir intervenir sur l’industrialisation est un but asséné régulièrement par la direction et certaines fédérations.
On est mal barré avec des syndicalistes pareils.
Alors pour nous occuper, pour « redonner confiance aux salariés » dont « les attentes sont fortes à l’égard des syndicats », comme le dit Thibault, on nous refait le coup des journées d’action à saute-mouton, histoire de remplir l’agenda des militants. Le 7 octobre, profitant de l’initiative de la Confédération syndicale internationale pour une journée du « travail décent » (sic), il y aura une journée d’action appelée par une intersyndicale sans FO ni la CFTC ; le 22 octobre : journée CGT de défense de l’emploi industriel ; 28 octobre : journée de mobilisation sur la pénibilité à La Plaine-Saint-Denis ; à cela s’ajoutent les journées catégorielles (22 septembre pour la Poste…) et tout cela nous amènera, peinards, au congrès de la CGT qui se déroulera en décembre à Nantes. Là, Thibault remettra son poste en jeu pour de faux car les jeux semblent faits, même si la contestation gagne du terrain à la base et même dans les appareils.
Lors des conflits qui éclatent partout en France, les syndicalistes CGT sont pourtant en première ligne, ce qui prouve une divergence ouverte entre la base et sa direction. Le 17 septembre se tiendra un rassemblement-meeting devant la Bourse de Paris, à l’initiative des syndicats en lutte de Continental, Goodyear, New Fabris, etc. ,pour montrer « tous ensemble » qu’on est contre les restructurations (celle de la CGT inclus) et pour exprimer le ras-le-bol de ces journées d’action bidon. Certaines fédérations se sont jointes comme la Métallurgie, la Chimie et le Verre. La volonté est de recommencer la démonstration du Mondial de l’automobile, le 8 octobre 2008, où les oppositionnels à la ligne du syndicat s’étaient montrés déterminés. Gageons que les prises de parole des fédérations proposeront des objectifs purement réformistes et que d’autres, plus ou moins du NPA, utiliseront ce moment pour peser lors du congrès, mais à défaut d’autres perspectives, ce rassemblement « off », par rapport à la direction de la CGT, semble plus qu’intéressant.
Bref le feuilleton syndical continue et cette énième saison ne semble pas la plus offensive, d’autant que les syndicats se trouvent dans une phase de fusion-acquisition, suite à la loi sur la représentation syndicale. Si le rapprochement UNSA-CGC ne semble pas marcher, la CFDT tente un rapprochement avec la CFTC (« nous avons une culture commune », dit Chérèque), et la CGT avec la FSU. évidemment ça sent les marchandages. Alors, à suivre…