Ravalement de façade

mis en ligne le 27 mai 2010
Pour qui présente des velléités épuratrices, l’engagement politique demeure sans conteste la voie royale où leur permettre de s’épanouir. Qu’on songe aux doux frissons éprouvés par les fondateurs ou membres des comités de salut public, polices politiques diverses ou tribunaux populaires dans les périodes agitées du passé. Mais les temps présents n’en sont plus, ou pas encore, aux délices des liquidations brutales d’une révolution sanglante ou aux plaisirs des exécutions sommaires et des emprisonnements d’un après-guerre vengeur. Alors, on a les épurations qu’on peut…
À la demande d’un conseiller municipal du Parti de gauche, un collège du XIIe arrondissement de Paris devrait donc être prochainement débaptisé. Cet établissement porte le nom de Vincent d’Indy, compositeur de musique mort en 1931, politiquement monarchiste, religieusement catholique et notoirement antisémite. Il n’est pas inutile de préciser ici que cet élu ravaleur de façade, lancé dans une mission purificatrice, proclame dans le même temps une admiration sans bornes pour Léon Trotski. C’est que la bien-pensance moralisatrice, écolo en diable, a toujours opéré une sorte de tri sélectif, qui permet de condamner tel personnage s’étant vautré dans une saloperie immonde et d’encenser tel autre, pourtant acteur de premier plan, parmi ses plus fanatiques partisans, d’une entreprise criminelle de masse.
À l’heure où plusieurs rapports accablants soulignent le formidable déclin de l’enseignement républicain, laïque et gratuit, suggérons aux amis de M. Mélenchon de débaptiser tous les établissements scolaires et, dans un strict souci d’équilibre droite-gauche, pour mieux rester en phase avec cette nouvelle fonction de l’Éducation nationale, devenue fabrique de crétins, de leur attribuer à parts égales les noms de Maxime Gremetz et de Frédéric Lefebvre, deux spécimens de choix dans l’intellect bas de plafond du monde politique représentatif et historiquement irréprochable…