Auprès de mon arbre je vivais heureux...

mis en ligne le 26 novembre 2009
Perversion de l’aumône, mépris de la pauvreté a t’on pu lire ça et là, à propos de la très médiatique opération du groupe Rentabiliweb qui a voulu consister à distribuer de l’argent dans les rues. L’absence de morale de cette performance pourrait sans doute susciter un peu d’intêret, un peu. Résultats des courses : bagarres, échauffourées, voitures détruites... la routine. Stop, on arrête tout et on garde l’oseille pour la prochaine fois.
L’affaire aurait sans doute en rester là et on pourrait pu délaisser cette actualité pour un PSG-Marseille des plus rafraîchissant, si la personnalité de quelques actionnaires du groupe Rentabiliweb n’avait été révélée par Le Canard enchaîné. On retrouve effet quelques pointures du calibre Bernard Arnault, Jean-Marie Messier ou Alain Madelin, parmi les dirigeants qui trouvent, pourquoi pas, l’affaire rentable. On se doit bien entendu de contester le principe de l’actionnariat mais en l’absence d’une autogestion généralisée, les choses sont ainsi faites. Ce que ces Messieurs ne peuvent plus désormais ignorer c’est que Rentabiliweb ne donne pas dans l’image pieuse mais aussi dans la fesse. Par un système de rachat d’entreprise dont ils ont le secret, le groupe possède quelques sites porno des plus alléchants dont jusqu’à présent aucun des administrateurs n’a trouvé à redire.
La fameuse trilogie sexe pouvoir argent, dans l’ordre qu’on voudra, qui semble dominer le monde est en place.
Mais qu’est ce qui vaut donc à l’argent, le pognon, la braise, la caillasse, l’oseille, le fric, les thunes, les radis une telle fascination, une telle folie au point que certains comportements atteignent parfois l’ignoble ? Sans doute les images de la consommation à outrance qu’il suscite, le rêve (que celui qui n’a jamais pensé à ce qu’il ferait s’il gagnait au loto me jette la première pièce !), les frustrations dépassées, les humiliations disparues et les inhibitions rompues. Jérôme Kerviel et le convoyeur de fonds dont j’ai oublié le nom sont désormais devenus des héros populaires avec tee shirts à leur effigie. Leurs faits d’armes sont glorifiés à longueur de temps. Voilà qui créé le buzz sur le web. Et oui ! Et si encore ils avaient fait plonger leur patrons pour une cause humanitaire quelconque? Même pas. Stratégie individuelle, enrichissement personnel, faut montrer qu’on en a (des sous et le reste aussi d’ailleurs ça va avec !) et pas qu’une pincée. Voilà la dictature de l’apparence. L’image positive qu’humainement et simplement on aime à donner ne passe plus désormais dans la grande majorité des cas par la Rolex pour les uns ou le Solex pour les autres.
Force est de constater que l’argent achète tout. Même l’inachetable. Les convoyeurs de fonds seront-ils plus en sécurité avec les primes ou les augmentations de salaires qu’ils réclament ? On peut en douter. Les victimes, ou les parents des victimes ne peuvent bien souvent retrouver la paix et douce et tendre chaleur d’un foyer retrouvé qu’avec quelques millions d’euros. Ainsi de nombreux rapports sociaux se retrouvent-ils pervertis et dévoyés par l’argent. Des trésors d’imagination et d’intelligence sont déployés pour le protéger, le falsifier, le voler. On peut rêver à toutes ces sommes d’efforts déployées pour des cause, plus justes et plus humaines. Mais non. Et le « Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front » (je vous fais grâce de la source), ne valant guère mieux, je vais retourner auprès de mon arbre à regarder vivre la civilisation.
Ça risque peut-être d’être un peu long.