L’Opus Dei, Dieu et César

mis en ligne le 4 mars 2010

Dès sa création, en Espagne, en 1928, son fondateur, Josemaría Escrivá de Balaguer, annonce la couleur : « Le but de l’Opus Dei est de diffuser le message évangélique en encourageant chaque individu, personnellement, à chercher à devenir “saint” dans le cadre de ses activités quotidiennes, qu’elles soient professionnelles, sociales ou familiales. »
En 1950, les premiers statuts de l’œuvre sont encore plus explicites : « Les moyens caractéristiques de l’apostolat de l’Opus Dei sont les fonctions publiques, notamment les fonctions dirigeantes. »
Le refus de la laïcité, en particulier institutionnelle, est ainsi prononcé !
Les objectifs de l’Opus Dei seront d’autant plus faciles à atteindre que, dès l’origine, sa spécificité repose sur le fait d’être essentiellement composé de laïcs, avec les grades de numéraires ou surnuméraires, selon leur niveau d’investissement dans l’œuvre.
Ces laïcs vont construire un véritable empire, dans un premier temps, dans et grâce à l’Espagne franquiste, à laquelle ils fourniront plusieurs ministres « opusiens ».
Bien que taxé d’extrémisme politique du fait de ses amitiés avec les régimes d’extrême droite de l’Espagne à l’Amérique du Sud, l’Opus Dei, par ailleurs mêlé à de retentissants scandales politico-financiers, accusé maintes fois de sectarisme, continuera son développement à travers l’Europe et sur tous les continents.
Cette véritable « mafia blanche » s’imposera d’autant plus que,en 1982, le pape Jean-Paul II lui accorde le statut de « prélature personnelle du Pape ».
Cette reconnaissance du Vatican lie dès lors directement l’œuvre à l’autorité du pape, qui va pouvoir l’utiliser ainsi comme sa « véritable armée papale », messagère de ses encycliques sociales et de la doctrine sociale de l’Église.
En quelques dizaines d’années l’Opus Dei va ainsi pouvoir infiltrer syndicats et partis politiques européens, devenir le véritable constructeur de l’Europe voulue par l’Église catholique.
De Robert Schumann, considéré comme « le père fondateur » de l’Europe, premier Président du Parlement européen, à Alcide De Gasperi, fondateur de la Démocratie chrétienne en Italie, Konrad Adenauer, chancelier allemand et chef de la démocratie chrétienne, Edmond Giscard d’Estaing, considéré comme « le cheval de Troie » des intérêts économiques de l’Opus Dei en France, sans oublier les Michel Camdessus ou Jacques Delors, tous ces hommes ont été ou sont des « opusiens » notoires ou des amis très fidèles, au service de l’œuvre.
Du traité de Rome en 1957 au traité constitutionnel récent, toutes les institutions européennes sont marquées du sceau de l’Opus Dei au service des intérêts du capitalisme et de l’Église catholique, apostolique et romaine !
Cette puissante organisation fournit depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale les soldats du « communautarisme chrétien », utiles au projet papal consistant à repousser toute avancée de la laïcité, à reconquérir le terrain perdu, de 1789 à 1905, 1936… sur les champs de bataille de l’histoire du mouvement ouvrier, laïque, révolutionnaire.
L’Opus Dei accompagne parfaitement le retour du religieux dans une période de crise sans précédent du capitalisme, et n’oublions pas que, il y a un siècle, un certain abbé Jules Lemire disait déjà : « Les lois se font par le peuple. À nous d’aller là où est la force pour nous emparer et la donner à l’Église. »
En forme de conclusion, citons Marc Prévôtel, camarade anarcho-syndicaliste récemment disparu, qui, dans son ouvrage Cléricalisme moderne et mouvement ouvrier souligne : « L’Église a toujours fait de la politique, en général celle du pouvoir en place… et n’a jamais pu se faire à la République. »
L’Opus Dei a bien la prétention d’être à la fois « Dieu et César », c’est-à-dire de contrôler les pouvoirs à la fois temporels et spirituels.