éditorial du n°1501
Les voyages au bout du monde, les séjours en palais des mille et une nuits, les croisières en yacht, les orgueilleuses et affriolantes histoires de fesses plus ou moins mondaines viennent avec délicatesse nous rappeler de conserver notre rang et de ne pas en faire un pataquès si le prix des denrées de première nécessité a pris 30 pour cent au supermarché du coin plus vite qu’il n’en faut à un chef d’entreprise pour délocaliser au Bangladesh.
Nos maîtres à (dé)penser, férus de respect envers les cocasses et exotiques superstitions officielles et si prolixes en leçons de morale (pas beau fumer, boire, pas beau se soigner, profiter de sa retraite, pas beau de ne pas acheter des soldes, pas beau de ne pas être à genoux devant Sainte Croissance, etc.), pour tout dire si fiers de leur réussite sociale et de leur entregent, battent tous les records de vulgarité, de prétentiardise et de cynisme élitiste à la face de ceux qui en bavent, qui crèvent d’angoisse et/ou de faim; de ces otages (vous avez dit otages!) d’un monde mis en coupe réglé par la féroce mondialisation néolibérale du fric et de la violence militaire et flicarde. Ah comme nous aimerions, tel certain poète affamé de la révolution de 1848, discerner dans le silence nocturne des mansardes et des HLM, non pas les bang bang de débiles séries américaines, mais le petit bruit aigre et bien réconfortant des couteaux qu’on affûte !