Saint-Ouen : le foyer Cara est toujours là !

mis en ligne le 10 juillet 2014
Débutée en janvier, sans aucune concertation ni information d’aucune sorte, la première vague d’expulsion fut rapidement stoppée grâce à la mobilisation des résidents et de leurs soutiens. Repoussée de quelques mois, la vaste opération visant à vider le Cara de ses quelque 110 habitants le fut une nouvelle fois en mars, à l’approche des élections. Élections remportées, à la surprise générale, par le candidat de la droite locale, lequel mit ainsi fin à près de 70 ans de règne sans partage du Parti communiste, puis du Front de gauche à Saint-Ouen. Ce qui par contre fut tout sauf une surprise a été de constater que la nouvelle équipe poursuivait dans la voie initiée par la précédente : trois demandes officielles de rencontre avec le maire restèrent ainsi sans réponse, jusqu’à ce qu’une poignée de résidents du Cara, accompagnés de leurs soutiens, s’invitent au conseil municipal du 23 juin dernier et fasse assez de bruit pour amener m’sieur le maire à accepter de recevoir une délégation, dès le lendemain. Cet entretien fut, comme prévu, laudatif, pontifiant, la seule certitude étant que le contrat de vente entre Vinci et l’association municipale gestionnaire du foyer était bel et bien signé, prévoyant la livraison du bâtiment, vidé de ces occupants, pour le 31 juillet. L’objectif, à peine voilé, du nouveau maire étant d’endormir la méfiance des résidents, il leur fut promis une tentative de « sauvetage » de l’association en question, permettant d’éventuelles renégociations pour ce qui est de la vente à Vinci. Sur l’air connu du « on va voir ce qu’on peut faire » fut également réactivée la fameuse « cellule de crise », programme d’enfumage mis en place dès janvier et auquel les résidents ne furent même pas associés. Depuis la rencontre de juin, le statu quo règne à nouveau, et l’avenir se charge plus que jamais de menaces pour les habitants du Cara, tout comme pour le personnel en charge du foyer, menacé, lui, de licenciement. Le directeur, pour sa part, s’est mis aux abonnés absents depuis que la mairie lui a trouvé une nouvelle planque, en qualité de directeur d’une maison de quartier. Le foyer, lui, se délabre à vue d’œil, au point qu’un décret d’insalubrité (ce cheval de Troie au service des expulseurs) pourrait bien, d’ici peu, surgir du chapeau magique d’une municipalité qui méprise ces jeunes travailleurs, comme elle méprisa les 800 Rroms, enfants compris, jetés à la rue cet hiver. Au Cara même, les gens s’épuisent, rongés par l’inquiétude. Des dissensions menacent le Collectif des résidents, qui a de plus en plus de mal à motiver celles et ceux qui, devant l’absence de résultats tangibles et la date fatidique approchant à grands pas, ont tendance à opter pour des solutions individuelles. Difficile d’expliquer à un jeune sans papiers, travaillant par exemple au noir et menacé d’expulsion que seule une lutte collective, organisée, âpre et s’inscrivant dans le long terme peut déboucher non sur une nouvelle précarité, mais à un dénouement si ce n’est heureux, du moins acceptable.
Ces résidents, dont la situation faite d’extrême insécurité et de criante pauvreté est tout simplement niée par les autorités locales, ne demandent pas leur maintien dans l’immeuble, à présent vétuste. Ce qu’ils veulent, et qu’ils sont en droit d’exiger, c’est une solution de relogement viable sur le long terme. La mairie leur oppose quelques milliers de dossiers en souffrance concernant des demandes de logements sociaux, sans même relever que, entre une expulsion programmée pour dans cinq semaines et les demandes en question, la différence est de taille. Selon la désormais célèbre stratégie visant à opposer les pauvres aux plus pauvres, la mairie tente de s’attirer les grâces et, éventuellement, le soutien du citoyen lambda en attente d’un appartement, souvent depuis des années. C’est faire le pari de l’égoïsme, de l’individualisme contre la solidarité. Un pari que le maire lui-même admet qu’il puisse être perdu : lors de la rencontre de juin, il déclarait aux résidents ne pas vouloir « d’une manifestation de 120 personnes devant le Cara, le jour de l’expulsion ». Avouant ainsi, à demi-mot, sa crainte de devoir supporter une bien mauvaise publicité en début de mandat, il admettait dès lors qu’une mobilisation collective, spontanée, était plus que probable. Bien entendu nous lui prouverons qu’il commet une grave erreur, en avançant le chiffre de 120 : en cas d’expulsion nous serons le triple, à minima ! Par ailleurs, et tandis que le maire s’inquiète d’une éventuelle vaguelette médiatique, des résidents parmi les plus alertes et conscients de ce qui se trame se préparent, eux, à l’occupation du Cara. Qu’ils soient assurés de notre pleine et entière, et active solidarité.

Groupe Saint-Ouen 93 de la Fédération anarchiste
www.fasaintouen.over-blog.com



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


A quatre pattes

le 23 août 2014
Toujours à l'ouest les gars... Berlusconi a régularisé plus de 170 000 sans-papiers en Italie en 2009. Vous croyez quoi? C'est parce que ce type est un humaniste qui pense que nous sommes tous frères à la surface de la Terre?
Non, c'est parce que ce type est un néo-libéral et que les mouvements de population exigés par le capital sont là pour détruire à la fois les acquis sociaux des travailleurs non qualifiés, et accessoirement leur référence identitaire et culturelle que le Marché américanisé n'avait pas encore démolie et qui fait le jeu de l'ethnicisation des conflits sociaux.
Mais vous les rédacteurs solidaires -plus avec les immigrés qu'avec les travailleurs de votre pays-, vous êtes sûrement d'accord avec le fait de régulariser plus de 170 000 sans-papiers d'un coup, comme Berlusconi :-D.
On appelle cela une contradiction intégrale et comme aurait dit l'autre, des idiots utiles du néo-libéralisme...

Guillaume

le 23 août 2014
Nous ne faisons aucune distinction entre les travailleurs, et surtout pas nationales. Les idiots utiles du capitalisme, en l'occurrence, ce sont ceux qui, comme vous, se plaisent à diviser les prolétaires, à les monter les uns contre les autres pour briser toute dynamique de lutte réellement collective ; les idiots ce sont ceux, en somme, qui se battent pour la préférence nationale dans l'embauche.
Pour défendre les acquis sociaux et en conquérir de nouveaux, la xénophobie n'est sûrement pas le bon cheval de bataille ; l'histoire le montre largement, d'ailleurs. Alors, plutôt que de perdre votre temps à chasser l'immigré et à le rendre responsable de la casse sociale en cours, participez donc à ces luttes qui, au sein du monde du travail ou ailleurs, rassemblent les travailleurs autour de leurs intérêts de classe pour la sauvegarde d'un minimum de bien-être.

A quatre pattes

le 24 août 2014
Donc quand Berlusconi régularise, vous applaudissez? Vous êtes donc d'accord avec ce gugusse? Si la réponse est simplement "oui", allez vous cacher sous terre...
Ceux qui divisent pour régner et qui ont détruit la classe ouvrière sont à la fois les gouvernements bourgeois à la solde des grands capitaux qui organisent les filières migratoires, et les humanistes aux grands coeurs que vous êtes et qui servent d'alibi à toute cette casse humaine.
La solidarité internationale de classe n'a jamais été que le fait de quelques pompeux vaniteux qui ont cru pouvoir unifier des pauvres de Calcutta aux campagnards de l'Algarve, en passant par les banlieusards de Goteborg...Si l'homme était un être hors-sol, sans identité et sans référence culturelle, cela aurait été possible. Mais en l'occurrence il n'en est rien. Le monde sans frontière profite toujours et d'abord au capital, de nombreux internationalistes trotskistes d'hier sont les néolibéraux d'aujourd'hui. Dans un monde où il nait 4 enfants à la seconde, un anarchiste censé ne doit pas se battre pour autrui. Chaque chose en son temps il se bat pour lui et les siens, sinon il fera comme vous: il perdra... et voilà aussi pourquoi aujourd'hui, le premier parti ouvriériste de France en vote déclaré est le FN, car une partie de la gauche le savait et a trahi et l'autre partie constituée de jeunots de moins de 30 ans se sont fait abuser.
Quant à la préférence nationale, si je voulais m'installer au Pérou ou en Ouganda, je ne pourrais pas prendre le boulot d'un autochtone ou accéder à ses terres, n'ayant pas la nationalité... et c'est bien normal...

David

le 25 août 2014
Salut,
la question des frontières se pose à une échelle globale. "A quatre pattes" manipule les mots pour mieux nous vendre son fiel nationaliste-révolutionnaire, identitaire et régionaliste.
Les migrations organisées par les gouvernements ? ils correspondent à des besoins locaux (à l'échelle planétaire) de régler des flux et les démographies pour satisfaire aux besoins de la production. Rien de plus, rien d'anar là dedans.
La compétition entre travailleurs ? Oui, elle profite au capital. Et oui, ceux qui comme vous participent à affaiblir les ripostes collectives en cassant du syndicaliste, sont les alliés objectifs de cette situation.
Car votre antienne, c'est encore et toujours: "Contre le capital mondialisé, fermons les frontières". Les français -si possible de souche, chrétiens et diplomés- contre le monde entier, quoi. Cette idée est d'ailleurs tellement fumeuse qu'elle n'est appliquée nulle part ailleurs.
Ce que demandent les gens que je connais, ce n'est pas de rester dans l'entresoi, entre blancs polis et de bonne famille, c'est de vivre décemment. Et vous faites partie de ceux qui répudient la protection sociale, les services publics... et renvoient les plus touchés d'entre nous à la débrouillardise individuelle, en clair, le loi de la jungle. Et parmi les plus touchés, oui, il y a des gens d'origine étrangère. Et alors ? Votre projet social est sélectif, sur des bases ethniques. Ma version de la solidarité, non. C'est toute la différence entre nous.

A quatre pattes

le 25 août 2014
"Contre le capital mondialisé, fermons les frontières"

Pouvez-vous être plus ridiculement caricatural que ça?
Non, je ne crois pas. A une époque où les néolibéraux n'avaient pas totalement détruit les frontières, ON FAISAIT du commerce sans souci, en appliquant droit de douanes pour protéger nos industries et préserver le gagne-pain des travailleurs.

Vous voulez le beurre et le cul de la crémière avec l'ouverture intégrale des frontières mais vous rêvez, car les mecs nous tondront jusqu'au dernier des humanistes solidaires des sans-papiers. Car contrairement à ce que tu crois cher David, la lutte pour ces pauvres bougres, j'ai donné et ça ne mène nulle part. D'ailleurs tes extrapolations sur ce que je pense des services publics prouvent bien que tu es conditionné comme un brave chien de Pavlov: les services publics doivent être denses, puissants et pour tout le monde.
Maintenant en continuant à accepter l'immigration de masse qui ne fait que le jeu du patronat, ces services publics sont condamnés et la privatisation arrivera totalement, tôt ou tard.
Par contre travailler à relever les Nations (toutes les nations sur tous les continents -stop à la françafrique et toute cette merde- et l'alternationalisme contre le capital mondialisé est un paradigme réellement porteur, brailler comme en 1913 "le nationalisme c'est la guerre n'a aucun sens aujourd'hui...), là est le vrai travail des révolutionnaires contre les réseaux transnationaux qui n'ont de souhait que de détruire ce qu'il reste des Etats providences les plus puissants.

David

le 25 août 2014
4 pattes,
les limites de ton raisonnement sont dans tes arguments.
"Des services publics pour tout le monde...": mais pas pour tous, puisque tu veut fermer les frontières et ne plus aider les sans papiers.
Tu veut relever les nations (tu mets un "N" à nation...), mais ce ne peut se faire que dans la course entre peuples, et avec des frontières fermées, je suppose.
Tu parles d'altermondalisme, mais ce courant est solidaire des sans papiers.
Notre objectif est de recréer des outils qui permettent de dépasser les contradictions de l'économie et de la politique qui ne visent, dans le cadre orienté par le capitalisme, qu'à gouverner et enrichir une poignée de gens au détriment de l'immense majorité.
Dans cet objectif, les limites rabougries du nationalisme ne servent à rien d'autre qu'à dresser des peuples les uns contre les autres. Et à favoriser les divisions entre nous.
Enfin, affirmer que les frontières n'existent plus relève d'une croyance. Les riches et les marchandises voyagent vite et bien, pas les hommes ou les femmes qui veulent échapper à la guerre, à l'oppression, ou aux conséquences désastreuses des changements climatiques. Et ils seront de plus en plus nombreux, faudra t'y faire.
Alors préparons nous à les accueillir...

A quatre pattes

le 25 août 2014
Gérer des flux migratoires en fonction de tes capacités d'accueil, ca ne veut pas dire FERMER les frontières.
Fait rentrer 10 types dans ton 30 m2 et ça va. Fais pareil avec 200 et on en reparle.

Une preuve de plus de ton conditionnement -après les frontières hermétiquement closes-, c'est que tu as lu dans mon message "altermondialisme" alors que j'ai écrit, relit bien, "alternationalisme". Reconnaîtras-tu ton erreur? J'en doute même.

Car aux Nations, je mets un "N", qu'elle soit ougandaise, sénégalaise ou française. Les gens n'ont pas à avoir honte de leur pays et c'est une spécialité en France que de plier sous le poids de tous les professionnels de la repentance qui désarment idéologiquement le peuple. Nous n'avons pas à rougir de notre histoire et des errements de nos castes dominantes. De l'histoire de France, je prends tout et je fais avec, je ne suis pas un petit consommateur qui fait son marché et qui distribue les bons points aux différents étalages...
Car c'est aussi dans le cadre de l'Etat-Nation, que nous avons réussi à organiser au mieux nos structures de développement et y compris celle de protection sociale.
Tu es simplement le reflet inversé des capitalistes sans frontières, tu rêves d'humanité et de paix à échelle globale, alors rassure-toi: eux aussi...