Peste brune sur Athènes

mis en ligne le 16 mai 2012
1673GreceSombre présage et sombre nuage sur l’Europe. Les néonazis du parti Chryssi Avghi (Aube dorée) recueillent 6,81 % des voix aux élections législatives grecques et obtiennent, par conséquent, 21 sièges au Parlement, sur 300. Pour contrebalancer cette bien mauvaise nouvelle, la formation de gauche radicale, Syriza, opposée au mémorandum d’accord de la Grèce avec les bailleurs de fonds du pays, devient la deuxième force politique du pays, de fait, les deux principaux partis historiques pro-austérité et pro-européens grecs, le Pasok (socialiste) et la Nouvelle Démocratie (droite), qui gouvernent ensemble dans une coalition depuis novembre, n’obtiennent pas la majorité au parlement. Ceci rend aléatoire la poursuite de la politique de rigueur orchestrée par l’UE et le FMI.
Nikos Mihaloliakos, le leader du parti néonazi, dont l’emblème rappelle celui du svastika, plus communément appelé croix gammée, est surnommé par les Grecs le «führer ». Il a fait sa première apparition après les résultats dans les médias, flanqué d’une quinzaine de jeunes néonazis rasés. Devant les caméras, il a affirmé que son groupe allait lutter contre les « usuriers mondiaux » et « l’esclavage », imposés selon lui au pays par l’UE et le FMI en échange de leur aide financière. Rappelant les discours devant le Reichstag avant l’incendie de 1933, il a menacé : « L’heure de la peur a sonné pour les traîtres à la patrie. »
Ceci ne manquera pas de rappeler de mauvais souvenirs au vieux héros de la résistance Manolis Glézos, 89 ans, qui avait décroché le drapeau hitlérien du sommet de l’Acropole à l’âge de 18, et vient également d’entrer au parlement dans la formation de gauche radicale Syriza. Comme en France, avec les votes pour Marine La Peine au premier tour des présidentielles, le professeur à l’université d’Égée Panagiotis Sotiris, interrogé sur le site de l’Huma, tempère : « Tous ceux qui ont voté Chryssi Avghi ne sont pas des fascistes. Ce sont des gens qui voulaient exprimer leur rage : c’est un vote antisystème ». Avant d’ajouter tout de même : « Pourtant, sous peu, beaucoup d’entre eux vont réaliser que Chryssi Avghi est un parti néofasciste. » Oui, mais trop tard : ce parti vient d’obtenir un passeport pour sa légitimisation et, à l’heure où nous bouclons, il n’est pas impossible de voir également en France un retour en force du FHaine au Parlement.
Mais, pour revenir au nouveau contexte grec, le parti des Grecs indépendants, une scission du parti de droite Nouvelle Démocratie, refuse également « le système », mais sur un socle radicalement nationaliste. Il a recueilli 10,31 % des suffrages. C’est très préoccupant, car dans plusieurs pays européens, en Hollande, en Hongrie, en Finlande, en Italie, en Suède, ces partis politiques recueillent de nombreux suffrages des populations. Et, dernièrement en France, Sarkozy n’a-t-il pas banalisé le FHaine en le déclarant comme « faisant partie intégrante de la République ? » Mais, si les partis populistes, de droite et d’extrême droite progressent dans toute l’Europe, ce n’est pas nous anarchistes qui allons dire que c’est leur progression en termes de résultats électoraux qui est la plus préoccupante. Plus préoccupante est cette mentalité ouvertement raciste européenne, qui prend une ampleur qu’elle n’avait pas connue depuis des décennies. Pointant aisément l’étranger du doigt, l’immigré coupable de tous les maux, surtout celui venu des pays islamiques. À la suite de la victoire de Hollande en France, Éric Besson fermant son compte twitter n’a-t-il pas laissé, comme message subliminal, que peut-être bientôt il le rouvrirait : « Inch Allah. » Sous-entendant une imminente nouvelle invasion des Sarrazins avec l’arrivée de la gôche et la réouverture de frontières ?
Pour leur part, les Grecs ont toujours plus ou moins eu une réputation de peuple xénophobe, mais jusqu’à ce jour, les recours à la violence verbale ou physique étaient rares, sinon contre les Roms, considérés comme de véritables parias (il y a quelques années, j’ai assisté à Athènes à une scène inhumaine, tandis qu’une vieille femme Rom était poussée par des usagers hors d’un bus à coups de pied, sans que nous touristes ayons pu empêcher ce qui aurait pu être devenir un crime collectif). Mais aujourd’hui, environ les deux tiers d’entrées illégales en Europe se font par la Grèce. Le pays accueille également tous les migrants qui ont effectué une demande d’asile en Grèce avant de se rendre dans d’autres pays de l’UE d’où ils ont été renvoyés. Ils sont très nombreux à camper, dans des conditions sanitaires souvent atroces, à Igoumenitsa, Patras ou encore Athènes. Mais avec la crise, la rengaine de l’immigré bouc émissaire bat son plein. Le quartier Daghios Pandeleïmona, en plein cœur de la capitale grecque, est devenu en moins de quatre ans le point de rassemblement de nombreux Afghans. Un afflux qui exaspère certains habitants qui ont formé un « comité de défense » de leur quartier. Ces derniers appellent au renvoi immédiat des migrants dans leur pays d’origine et ils n’hésitent pas à recourir à des méthodes musclées pour, comme ils le disent, « nettoyer leur quartier ». Les attaques contre les clandestins y sont désormais quotidiennes et les insultes racistes fusent. Et il est fort à redouter que la légitimisation du parti néonazi ne fasse rien pour calmer les choses.



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


jirel

le 16 mai 2012
Donc, la Grèce est en désarroi profond à cause des FMI et autres UE, la famine y fait son lit et les suicides explosent, mais tout ce qui vous intéresse est de dénoncer ceux qui justement veulent lutter contre ces criminels en col blanc.
Vous vous dites libertaires mais êtes prêts à tuer des populations entières, à les rendre esclaves de la finance internationaliste pour "lutter contre le fascisme".
Avec des gens libres comme vous le pouvoir oppresseur n'a pas de souci à se faire: il sait qu'il peut compter sur des bons petits soldats prêts à mater dans le sang toute rébellion qui nuirait à leurs intérêts.
Vous ne vous rendez vraiment pas compte que les vrais fachos, les vrais criminels, se passent du vote populaire pour agir et imposer aux nations leur dissolution et leur ruine?
Lutter contre 6% de la population grecque et appeler à la haine contre 18% des Français est totalement absurde ET contre productif quand on sait (mais avez-vous même pensé à vous renseigner?) qui tire les ficelles.
Nul n'est plus aveugle que celui qui ne veut pas voir et nul n'est plus esclave que celui qui croit à tort être libre.

Un socialiste libertaire

le 17 mai 2012
La situation en Grèce ne doit pas être dramatisé. Aube dorée et ALEN ont fait 17% le 6 mai mais les sondages les donnent en dégringolade, tombant chacun sous les 5%. Je ne m'inquiète pas des nervis fascistes à Athènes car je sais que nos camarades anarchistes, qui sont les plus expérimentés d'Europe, sauront s'en occuper.
Non aujourd'hui le fait marquant est la progression de Syriza. Même si c'est l'équivalent du Front de Gauche, je soutiens ce parti. Je suis favorable à l'idée d'une alliance électorale de Syriza avec le KKE et Antarsya. Un telle formation ferait 30%. Mais le parlementarisme serait un à-côté, l'essentiel est la lutte dans la rue des travailleurs. Les Grecs ont beaucoup appris et je suis certain que dans les mois à venir une révolution aura lieu. Celle-ci sera le prémisse à d'autres révolutions, en Espagne et en Italie particulièrement.

Soutien à Syriza et aux anarchistes grecs !