Remise en cause du 100 %

mis en ligne le 19 novembre 2009
Plutôt le chou que la chèvre…
Dans un élan populiste, caressant un jour la chèvre (les pauvres) et tous les autres jours le chou (les riches) Sarkozy a, d’une part, dénoncé « les inégalités sociales qui font qu’entre trente et soixante-cinq ans, un ouvrier a un risque deux fois plus élevé qu’un cadre de mourir de cette maladie ». Pour faire passer la pilule du déremboursement il s’est, d’autre part, une fois encore répandu en promesses (ça ne mange pas de pain, comme dirait l’autre…), de faire des efforts en matière de recherche.
Bien, mais derrière ces belles paroles, nada sur le cancer professionnel. Normal: quand on est du côté du manche des patrons du CAC 40, on ne va surtout pas pointer du doigt leur responsabilité en cas de maladies professionnelles. Est-ce qu’au XIXe siècle, les patrons des grandes mines de charbons étaient mis en cause concernant la « phtisie des mineurs » ?
Non, c’est tellement plus tentant et logique pour ce gouvernement de réfléchir à comment réaliser des économies sur le dos des grands malades ! Acté : Sarkozy apporte son soutien à une mesure, très controversée, inscrite dans le projet de budget (PLFSS) 2010 de la Sécu. Selon l’article 29 du PLFSS, au motif que plus de 60 % des cancers sont curables et que de nombreux malades peuvent être déclarés guéris au bout de cinq ans, les victimes de cette pathologie, qui bénéficient du régime des ALD (Affections de Longue Durée) garantissant une prise en charge des soins à 100 %, en seront désormais systématiquement sortis au bout de cinq ans.
L’ALD, précise le texte, sera renouvelé, au-delà de cette période, « s’il y a nécessité de poursuite d’une thérapeutique lourde ou de prise en charge de séquelles liées à la maladie ou au traitement ». Ben… Il ne manquerait plus que le contraire ! Mais, en dehors de ces cas, le malade dit « guéri » ne bénéficiera du remboursement à 100 % que sur les examens nécessaires au suivi. En fait, tout l’inverse de l’intention du discours de Sarkozy, de mettre l’accent sur « la vie après le cancer » !

Malades : évitez la récidive !
En effet, comme l’explique la cancérologue (socialiste) Michèle Delaunay: « Beaucoup des cancers nécessitant un suivi très prolongé risquent d’échapper à celui-ci et au dépistage précoce des récidives en raison de cette sortie d’ALD qui ne signifie pas toujours guérison. » Et la députée de Gironde de s’inquiéter : « Un patient dont on interrompt la prise en charge et qui s’entend déclarer être guéri est logiquement incité à cesser le suivi, qui reste dans bien des cas nécessaire. On risque alors de dépister trop tard une éventuelle récidive. » Pour elle : « Seul un médecin connaissant parfaitement le type de cancer, les critères pronostiques initiaux à l’intérieur de ce type, peut décider ou non du bien-fondé de la sortie du cadre des ALD. La loi ne peut en aucun cas se substituer au médecin et rendre uniforme ce qui est obligatoirement individuel, précisément adapté à chaque cas. »
Cette mesure est donc contraire au souci affiché du gouvernement d’intensifier le dépistage, et pourtant, Sarkozy l’a qualifiée « d’intéressante ». On suppose qu’il faut entendre financièrement ? En restreignant le maintien du 100 %, ce gouvernement sait très bien à quels assureurs privés se vouer pour combler le gigantesque trou de la Sécu et pour offrir à ses copains, des pans entiers du système de mutualisation des dépenses de santé ! Et il a le culot d’appeler ça un plan de lutte contre le cancer ? Les associations de grands malades, dont Act-Up Paris sont très inquiètes à propos de cette mesure. Elles y voient un coup d’envoi d’une remise en question, pour l’instant parcellaire, de la prise en charge à 100 %. Après le cancer à qui le tour ?