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Luttes syndicales
par Nicolas le 20 février 2023

Les infos circulent...

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Pour le numéro de février du Monde libertaire nous avions lancé un appel aux anars d’ailleurs. Les infos se jouent des frontières. Nicolas, du groupe Gaston Leval, a ainsi à rédigé un article à destination de compagnons pas au fait de nos affaires françaises. Ça date peut-être un peu, mais ça peut servir de rappel...






La bataille des retraites



Ce jeudi 19 janvier, des manifestations se sont déroulées sur tout le territoire français, et l’on estime à près de deux millions le nombre de personnes qui se sont mobilisées, tant dans la capitale et les grandes villes que dans des communes bien plus modestes où semblable mobilisation n’avait pas été notée depuis près de trente ans.

De quelque bord qu’ils soient, les gouvernements se suivent et se ressemblent. Ils décrètent tous, après avoir juré qu’ils ne toucheraient à rien, que l’équilibre financier du régime des retraites est menacé, et qu’il faut réformer : il n’y a pas d’alternative ! D’une réforme à l’autre, l’âge légal de départ à la retraite est aujourd’hui de 62 ans, et les annuités ou nombres de trimestres travaillés, pour obtenir une retraite à taux plein, augmentent. Donc sans être le grand maître des chiffres, chacun comprend qu’il va falloir travailler plus pour toucher moins.

Ces dernières années, les caisses des régimes de retraites sont à l’équilibre et même bénéficiaires. Pourtant, soucieux de notre futur, nos sages dirigeants crient à la catastrophe prochaine, et annoncent que dans deux ou trois ans, si rien n’est fait, la ruine guette. Mais ils ont une recette pour éviter le désastre. La recette est simple et est de bon sens disent-ils, puisque l’âge moyen de la population s’allonge il est logique de travailler plus. Donc le bagne salarial sera prolongé de deux années : on ne part plus à 62 ans, mais à 64 ! Et puis, comme si cela n’était pas suffisant, il faudra pouvoir justifier de 43 annuités de salariat pour disposer d’une pension pleine et entière !

Les pauvres gens qui ont appris à compter, parce qu’ils doivent le faire toute leur vie ont vite fait d’aligner les plus et les moins. Et puis ils voient bien en regardant autour d’eux, que pour leurs pères, mères et amis qui font les métiers les plus pénibles, pour ceux-là, la durée de vie n’augmente pas, elle a plutôt tendance à diminuer. Et donc les pauvres, qui ne sont pas aussi idiots que les gouvernants veulent le penser, commencent à comprendre qu’à force de travailler plus longtemps, ils finiront par crever la bouche ouverte en franchissant la ligne d’arrivée toujours repoussée, à la manière du coureur de Marathon. Tout au plus leur laissera-t-on le temps de reprendre un peu leur souffle avant de rendre le dernier.

Alors, comme le crime profite toujours à quelqu’un, et que ceux dont la durée moyenne de vie s’allonge ce sont les classes les plus favorisées, les riches pour le dire vite, les pauvres commencent à comprendre qu’on les prend pour des cons. Les pauvres comprennent que les pensions qu’ils ne toucheront peut-être jamais, elles serviront à payer les retraites des mieux lotis. Plus favorisés parce qu’en meilleure santé, avec un salaire plus élevé…

Le président Macron a fait de ce texte de loi très idéologique une priorité, la marque de sa volonté de réformer. Il prétend en avoir acquis la légitimité par sa réélection puisque ce projet était dans son programme. Il oublie sans doute qu’il n’a recueilli que 20% des votes des inscrits au premier tour de l’élection présidentielle de 2022, quand les abstentionnistes dépassaient les 28%. Belle légitimité !

Le projet de loi doit être présenté au parlement d’ici la fin du mois. Une bataille de procédure est promise par les oppositions de gauche. Le gouvernement dispose d’une majorité relative et doit trouver des alliés de circonstance, plutôt à droite, très à droite. Les négociations auxquels Macron prétend être ouvert ne se feront qu’à la marge, avec l’objectif de fissurer l’unité des syndicats.
Une telle unité ne s’était pas vue depuis longtemps. Aujourd’hui, tous les syndicats, des plus radicaux aux plus réformistes, sont opposés à l’allongement de l’âge de départ en retraite. Une autre mobilisation est prévue pour le 31 janvier, et on peut s’attendre à ce qu’elle soit largement suivie. Cependant en dehors des journées de mobilisation, la protestation n’a pas encore débouché sur d’autres formes d’action. Les démonstrations de force que constituent ces manifestations massives ne menacent pas directement le gouvernement. Ces cortèges bi-hebdomadaires font des images spectaculaires pour la télévision, mais ne perturbent pas l’économie. Ils n’instaurent pas un rapport de force, même si dans certains secteurs d’activité, énergie, ports et docks, transport ferroviaire, on commence à parler de grèves reconductibles.

La répétition de mobilisations d’ampleurs est très possible. Mais il est probable que cette vox populi ne sera pas entendue, sinon de manière marginale, de façon à satisfaire les médias dominants qui s’en feront le relais. Comment s’exprimera la colère et l’amertume qui naîtront sans aucun doute de ce qui sera perçu comme du mépris par toutes celles et ceux qui n’ayant plus grand-chose à perdre choisiront peut-être de poursuivre la lutte ? C’est un peu de cette manière qu’avait commencé la révolte des « Gilets Jaunes ». On a vu des batailles se poursuivre, même après l’adoption d’une loi, jusqu’à rencontrer la victoire. L’histoire n’est donc pas écrite, et c’est assurément la rue qui sera à même d’en dessiner l’issue.

Nicolas
Gr Gaston Leval de la Fédération Anarchiste
PAR : Nicolas
Groupe Gaston Leval
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