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par Pippo Gurrieri le 15 mars 2021

Le capital au gouvernement

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Traduction Monica Jornet Groupe Gaston Couté FA



Sicilia Libertaria 06.03.2021
Si quelque chose ressort clairement du recours à l’énième gouvernement technocratique, c’est la faillite de la démocratie , pour quiconque ayant encore des illusions quant à ses "grandioses et progressistes destinées" ; pour nous, adversaires de tout gouvernement, par contre, la démocratie a mis bas le masque en découvrant sa face cachée totalitaire sous des apparences trompeuses. Ceux qui se sont en revanche suicidés politiquement, ce sont les populismes et les réformismes, ces deux modalités de gestion du néolibéralisme en apparente et théâtrale concurrence apparente. À présent le roi est nu, l’orgie du "transformisme" [jeu de coalitions parlementaires] est en marche, l’aristocratie bourgeoise triomphe, et la tragédie de l’homme fort sauveur de la patrie revient à la mode. Ce n’est plus un gouvernement au service du capital mais le capital au gouvernement, avec pour mission de repeindre en vert l’exploitation et la dévastation environnementale en gérant directement le Green New Deal (Nouveau Pacte Vert : plan européen de reconversion écologique) et ses rejetons post-pandémiques que sont le Recovery fund ou la Next Generation EU (Plan pour la Reprise Économique Européenne pour la prochaine génération ) : des tonnes d’argent pour les États, qui à leur tour doivent les verser au privé, en déchargeant la dette sur la population qui vit de son travail ou d’allocations et d’espoirs.

Et qui mieux que Mario Draghi pour s’acquitter d’un si agréable devoir (pour la haute finance, les banques, le Vatican, Confindustria et consorts) ? Son curriculum est sans tache : chez Goldman Sachs, il a programmé la liquidation des "joyaux de la couronne" italiens et asphyxié la Grèce en imposant des mesures drastiques à la population ; depuis la BCE, il a conduit les réformes dans le sang et les larmes du gouvernement Monti (inoubliables larmes du crocodile Fornero) qui brûlent encore la société italienne. Qui donc mieux que Draghi peut porter le coup de grâce aux restes de l’État-Providence dans le monde du travail (abolition de la caisse d’allocations chômage, déblocage des licenciements, enterrement du droit de grève), dans les secteurs de l’éducation, de l’université et sociaux, qui mieux que lui peut supprimer des services publics et des postes de travail, s’acharner sur les travailleurs, les précaires, les chômeurs, les retraités et gérer les fonds européens en distribuant de l’argent aux patrons, à l’appareil industriel et militaire, au Vatican, en renforçant la loyauté servile envers les États-Unis.

Il s’agit de fournir un alibi en béton (sauver le pays, l’avenir des jeunes, la lutte contre l’ennemi Covid-19) à tous les partis pour justifier la grande bouffe ensemble, un tour de cochon qui les implique tous avec passion, sans masque et sans l’ennuyeuse rhétorique habituelle : Mouvement 5 étoiles en tête, désormais spécialiste des voltefaces (Tav, Tap, Ilva, Muos etc) et qui ne survit qu’en s’agrippant à des fauteuils d’élus ; avec Fratelli d’Italia à qui on a demandé de jouer le rôle de la nécessaire opposition ; et la pétaudière CGIL, CISL e UIL qui chante les louanges de l’unité nationale retrouvée (citation de Michele Riondino: “Landini [secrétaire général de la CGIL] pourrait désormais présider Confindustria”).

Résultat prévu : reprise des chantiers et éventrement des territoires, forages, trains à haute vitesse et abandon des lignes locales, culpabilisation des migrants. L’état d’urgence indéfini (et la désignation du général de corps d’armée Figliuolo en remplacement d’Arcuri comme Commissaire extraordinaire pour l’urgence covid la en dit long…), garantit les coudées franches à cette "phobocratie" mafieuse et terroriste dans laquelle chaque parti a placé la crème de la crème : du membre de la Lega, Giorgetti, pour défendre le Nord (dans une coalition très couleur de la Lombardie et la Vénétie), au pro Renzi, Cingolani, une sécurité pour l’industrie de l’armement (dont il est issu) et pour la transition écologique gérée par les requins du capital ; de Colao [ex PDG de Vodafone, ministre pour l’Innovation technologique et la Transition numérique], à la transition numérique au service des seigneurs des multinationales de la téléphonie et de la 5G, avec des champions de l’ultralibéralisme tels que Brunetta, Gelmini, Franco, Cottarelli, ennemis historiques des travailleurs, du Sud, et de tout ce qui sente de près ou de loin le public et le social. Avec eux, pléthore de sous-secrétaires ignorants et arrogants, bien dressés pour servir les intérêts de leurs patrons : des sentinelles de Salvini et de Berlusconi aux postes clés de la Défense, de la Justice, de l’Édition, de l’Intérieur, des fauteuils savamment distribués parce que ce qui compte c’est le pouvoir du clientélisme.

Il est difficile de dénoncer ce gouvernement et dévoiler les manœuvres du capital en raison du matraquage médiatique sur la pandémie et du frein -tout impossible soit-il- à l’action politique et sociale de par l’état d’urgence, mais aujourd’hui plus que jamais, on doit insister, une nouvelle fois, sur les intérêts opaques que cachent la gestion de la pandémie et dénoncer les choix du gouvernement visant à prolonger une situation d’État policier qui leur est favorable. Il faut affirmer l’importance de garantir un revenu à toutes les victimes du système capitaliste, revendiquer par les luttes la réduction des horaires de travail et le plein emploi, ainsi que l’arrêt des dévastations environnementales et des industries toxiques, des grands ouvrages inutiles et nuisibles, des dépenses militaires ; faire payer au patronat et aux riches, le prix du gouffre social dans lequel est plongée la société.


PAR : Pippo Gurrieri
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