Il n’y pas de combat antifasciste inutile

mis en ligne le 22 mars 2012
16665AntifaNous tenons à répondre 1 à l’article « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté » paru dans Le Monde libertaire n° 1660 et signé du Cercle libertaire Jean-Barrué. En effet, cet article reprend une partie d’un de nos tracts (sans le citer…) pour ensuite caricaturer la lutte antifasciste que nous menons à Bordeaux depuis des années.
À Bordeaux, les différentes composantes de l’extrême droite sont présentes depuis des années. Leur implantation a été bien facilitée par la mairie qui a donné une église aux intégristes, leur a permis d’ouvrir un collège où les gamins s’éclataient sur des chants nazis. Dies Irae puis les identitaires se sont implantés dans les environs. Ils ont fini par se sentir suffisamment forts pour organiser une des trois marches annuelles nationales anti-avortement. En 2011, le Renouveau français s’est offert une retraite aux flambeaux dans les rues de la ville, avec protection policière en prime. Après plusieurs années de riposte dispersée et face à l’inertie générale, des militants anarchistes, syndicalistes et féministes ont décidé d’unir ponctuellement leurs efforts en créant le Groupe de résistance anarchiste antifasciste (Graaf).

Il n’y pas de combat antifasciste inutile
L’argument selon lequel les ennemis principaux sont au pouvoir ne tient pas longtemps : même si le Bloc identitaire, Égalité et Réconciliation, etc. ne sont que des groupuscules, ils cherchent à occuper le terrain par des actions ultraviolentes dont les premières victimes sont les immigrés, les homosexuels, et bien sûr les militants qui les combattent. De plus, ces groupuscules alimentent en idées et en militants les partis plus institutionnels depuis des années. Pour exemple, le concept d’identité nationale est sortie du chapeau du Club de l’horloge ; des ministres comme Longuet, Devedjian et Novelli, pour ne citer qu’eux, sont passés par Occident. Les laisser avoir pignon sur rue ne fait que faciliter la diffusion de leurs idées. Pour nous, il est important de se battre à la fois sur le front des idées et sur celui de leur diffusion. Bref, il s’agit de combattre les idées et pratiques fascistes partout où elles sévissent.

Un combat global
Vu de l’extérieur, on peut avoir l’impression que nous donnons la priorité au combat contre l’extrême droite au détriment d’autres luttes. En fait, c’est juste que nous nous retrouvons souvent bien seuls quand il s’agit d’actions spécifiquement antifascistes. L’existence même de ces luttes dépend le plus souvent de notre mobilisation, parce que le terrain a été abandonné par les centrales syndicales et les partis depuis bien longtemps. Mais nous sommes bien présents dans les autres luttes, même si nous sommes moins visibles, dans les médias notamment.
Pour mener un antifascisme digne de ce nom, il faut que sa fin et ses moyens soient clairement placés dans un projet anarchiste de changement social. Notre antifascisme est révolutionnaire : nous plaçons la critique de l’État et l’anticapitalisme au cœur de l’analyse du processus de fascisation. Notre antifascisme est également antipatriarcal. Nous refusons l’ordre moral que veut nous imposer l’extrême droite, comme nous refusons de laisser la lutte antifasciste uniquement à des mecs musclés (jeunes ou moins jeunes…) qui savent se battre (et peuvent en témoigner). Enfin, notre antifascisme est internationaliste, car c’est évidemment la meilleure réponse aux logiques nationalistes : abolition des frontières, libre circulation, solidarité internationale, rejet des logiques de guerre, telles sont les revendications indissociables de notre lutte antifasciste.
À Bordeaux, nous agissons depuis des années sur le terrain de la propagation des idées et des pratiques en organisant à l’Athénée libertaire des débats aussi bien sur la question de la lepénisation des esprits que sur la critique de l’État, du capitalisme, du patriarcat, etc. Nous sommes également présents sur les luttes de sans papiers et les autres mouvements sociaux contre les réformes gouvernementales. Quand les fachos-cathos intégristes ont initié, il y a trois ans, la première « marche pour la vie », nous avons naturellement appelé à une large mobilisation populaire qui a, lors de la deuxième édition, rassemblé 2 000 personnes.

Ni dans la rue, ni au pouvoir, ni dans les têtes, nous ne laisserons l’extrême droite s’installer !
Quand Christine Boutin, Marine Le Pen ou Alain Soral viennent faire un meeting, nous nous mobilisons. Quand une église est gracieusement octroyée aux intégristes, nous nous mobilisons. Quand le Bloc identitaire ouvre un local, nous nous mobilisons. Ces mobilisations passent bien sûr par des manifestations, mais aussi par la diffusion de tracts dans le voisinage, sur les marchés, des collages, l’organisation de réunions publiques. Nous ne crachons sur aucun moyen à notre portée pour faire reculer le fascisme.
Prochaine échéance : manifestation contre la « marche pour la vie », samedi 24 mars à 13 heures, place Pey-Berland.

Le Graaf
(composé par des individus, le collectif anarchiste féministe non mixte, le Groupe anarchiste bordelais, les CNT, Alternative libertaire)




1. Réponse adaptée d’un quatre pages produit et diffusé par le Graaf.