Le peuple uni ne sera pas vaincu

mis en ligne le 28 octobre 2010
1610PuebloMoi qui d’habitude n’y prête guère attention, je me surprends à appréhender cette Toussaint qui approche. La superstition n’y est pour rien. Je crains simplement – et je ne dois pas être le seul – qu’une ambiance funèbre ne couvre trop brutalement un mouvement social logique, vivant et inventif, qui maintenant éclate ça et là en révoltes spontanées.
Qui peut se réjouir comme hier de ces journées d’action aux affluences record ? De nouveaux rendez-vous sont annoncés qui, n’en doutons pas, seront massivement suivis. Mais le pic est sans doute passé. Alors, qu’attendre d’autre désormais qu’un inéluctable délitement, à mesure que les centrales syndicales estimeront avoir obtenu un « maximum réaliste » et que les manifestants, lâchés, se retrouveront de plus en plus isolés dans les cortèges ?
Depuis quelques jours, ce beau mouvement se radicalise. Avec une intelligence, une détermination, et une précision remarquables, les grévistes – sans être nécessairement nombreux – paralysent les centres névralgiques de l’économie, faisant au pays tout entier la démonstration de la vulnérabilité du capitalisme.
Cela, le pouvoir ne le supporte pas.
Déjà, il envoie ses nervis assermentés casser les piquets de grève et ses préfets réquisitionner les salariés en lutte. Désormais, le combat s’est engagé sur le terrain de l’action directe, celui d’un peuple qui s’affranchit des bonzes syndicaux, jette aux orties les promesses frelatées des politicards, et désobéit aux ordres aboyés par un pouvoir en état d’alerte.
Ce dernier va tout faire pour juguler et briser cette volonté de prendre ses affaires en mains, à commencer par la lutte et les moyens choisis pour la rendre la plus efficace possible. Et, dans un premier temps, il n’a pas d’autre choix que de briser le soutien – essentiellement moral pour le moment – que la majeure partie de la population porte au mouvement de grève, y compris à sa frange la plus combative.
Ne soyons pas surpris de voir les flics provoquer, harceler, attaquer brutalement manifestants et grévistes, afin d’allumer des affrontements dont, même blessés, ils sortiront vainqueurs. Ne soyons pas surpris d’entendre l’appareil médiatique raccorder ses violons sur la gamme sécuritaire pour mieux rassembler, par la peur, une majorité émotive derrière son chef. Ce sont là de vieilles recettes et ne nous y trompons pas : elles sont redoutables.
À l’heure où les pantins sénatoriaux et parlementaires ont rempli leur office, nous sommes à la croisée des chemins : ou bien le mouvement social sera conduit à la même défaite que celle subie en 2003, et nous en sortirons plus démoralisés que jamais. Ou bien nous saurons construire des espaces et des mécanismes de solidarité efficaces, afin de préserver voire renforcer un rapport de force favorable et une unité populaire vitale.
Une dynamique de coordination et de convergence de lutte des exploités et des « sans » (sans-papiers, sans-travail, sans-voix…) constitue désormais tout l’enjeu du mouvement. Elle seule pourra conduire à une victoire qui nous fera prendre conscience de notre force, et cela ne sera pas inutile pour l’avenir. Si les choses se passent autrement, nous risquons de porter, encore, le deuil de notre émancipation.



COMMENTAIRES ARCHIVÉS


56255Meuni

le 28 octobre 2010
J'ai bien peur que la bataille contre la réforme des retraites laissent de profonds souvenirs mais que des souvenirs comme même.