Gabon, Afghanistan, Palestine : le soleil tape plus fort au sud

mis en ligne le 17 septembre 2009
Total, Bolloré et toutes les entreprises françaises qui pillent méthodiquement les ressources naturelles du Gabon depuis des dizaines d’années ont observé avec une attention relâchée les péripéties relatives au déroulement de l’élection présidentielle du 30 août. Et pour cause, la Françafrique – politique vouée aux gémonies dans les discours officiels – demeure la pierre angulaire de l’État français dans ses anciennes colonies d’Afrique. Or, si la Françafrique, via ses déclinaisons pratiques, est un gigantesque obstacle au développement des régions qu’elle nécrose, inversement elle fait les délices des régimes qu’elle soutient et des prédateurs copulant avec.
Le Gabon vient d’en fournir la sombre preuve. « Papa » Bongo ayant récemment cassé sa pipe (après plus de quarante ans de pouvoir sans partage à la tête de son pays), ses vibrionnants autant qu’ambitieux héritiers, plus leurs obligés, sont convenus que l’oint des élections serait le moyen le plus sûr pour perpétuer la dynastie familiale. Bénéficiant des moyens de l’appareil d’État et du soutien de l’armée et de la maîtrise de la quasi-totalité des moyens d’information, Ali Ben Bongo (le fils de qui vous savez) a pu jouer «l’Hussein» Bolt des urnes. Toutefois, estimant que deux précautions valent mieux qu’une, le tonitruant personnage a organisé une fraude à grande échelle. Très naturellement les 15 autres candidats au fauteuil présidentiel se sont étranglés d’indignation. Parallèlement, la rue s’est enflammée, tout particulièrement à Port-­­­­Gentil, la capitale économique du pays, ce qui a valu une pluie de balles aux malheureux qui ignoraient que les mots démocratie et mascarade sont bien souvent interchangeables. Sarkozy n’a rien vu ; Kouchner rien entendu. Mais que voulez-vous, les affaires sont les affaires n’est-ce pas ? Sans compter que quelques valises bourrées de billets pour contribuer au financement des campagnes électorales des pourfendeurs de la Françafrique permet de laisser accroire que Bongo junior n’est pas un Total mauvais gars.
Ce n’est pas en Afghanistan que l’on verrait un nombre de bulletins dépouillés supérieur à celui des bulletins distribués ; une participation au vote squelettique ; des monceaux de votes achetés pour une poignée d’Afghanis ; le dépôt de 2 820 plaintes pour fraude par les rivaux de Hamid Karzaï, etc. Eh bien, détrompez-vous, tout ceci a eu lieu sous le regard impavide (ou presque) des représentants de la « communauté internationale ». Le cynisme des « grands » étant souvent inversement proportionnel à leur taille, l’impayable (façon de parler) Sarkozy a déclaré : « En Afghanistan, je partage l’analyse de Bernard Kouchner : la campagne électorale s’est bien déroulée. » (Propos tenus le 26 août lors de sa conférence devant les ambassadeurs.)
Les envolées oratoires du type : « l’Afghanistan est sur le chemin de la démocratie ; nous devons endiguer puis éradiquer le terrorisme avant qu’il ne se propage au Pakistan, état doté de la force nucléaire ; nous avons pour impératif de créer les conditions de l’émancipation des femmes afghanes », sont de pures figures de rhétorique destinées à camoufler l’alignement pur et simple sur les positions de la puissance impérialiste dominante : les États-Unis.
Observons ce qui résulte de la politique de la canonnière, pardon, des agissements très désintéressés des porteurs en uniforme de la démocratie : le soutien à un régime corrompu jusqu’à l’os, régime lui-même appuyé sur une kyrielle de seigneurs de guerre ; des bombardements si « chirurgicaux » qu’ils déciment de plus en plus de civils (2 118 morts en 2008, en nette hausse par rapport aux 1 523 civils tués en 2007) ; l’usage par les États-Unis de la torture dans les zones rurales ; une aggravation de la faim et de la misère particulièrement dans les zones rurales, etc.
Et les mensonges mortels continuent de pleuvoir en Rafale.
Gentilles urnes au Gabon, en Afghanistan, vilaines urnes en Iran comptèrent au nombre des marronniers de l’été. Mais, dans ces odes poisseuses à la démocratie ou à la déploration de son absence chez les enturbannés de Téhéran, sauf du bout des lèvres, les chancelleries occidentales et les médias aux ordres firent l’impasse sur les derniers forfaits de la « seule démocratie » du Proche-Orient, à savoir Israël.
Faisant fi des prescriptions de la « feuille de route » (document fixant les étapes devant aboutir au règlement du conflit israélo-palestinien sur la base de deux États), tout autant que des objurgations ou suppliques des puissances occidentales, le gouvernement de Benyamin Netanyahu a donné le 7 septembre son feu vert à la construction de plusieurs centaines de nouveaux logements dans les colonies juives en Cisjordanie occupée. Nombre d’exégètes en géopolitique estiment que Barack Obama n’a pu amener à résipiscence les architectes d’un État juif ethniquement pur au motif qu’il bataille actuellement dans son pays pour faire adopter son programme pour la santé. Parions qu’à la prochaine vague de nouvelles constructions le justicier planétaire sera occupé à découper en famille la dinde du Thanksgiving Day. Ainsi, profitant de l’occasion, les dirigeants de l’État hébreu continueront à découper le droit international au chalumeau en chassant les Palestiniens de leur propre terre. Les Palestiniens veulent-ils paraître fréquentables aux yeux de leurs geôliers et de leurs complices ? Ils le deviendront le jour où ils accepteront, par la « loi » des urnes sorties directement des canons fumants, de vivre misérablement dans les bantoustans dans lesquels ils seront emmurés.