Localités et territoires

mis en ligne le 26 novembre 2009
Ça a fait la une de pas mal de quotidiens et magazines, quoi ça ? Eh bien la fronde des élus locaux, maires et conseillers généraux mobilisés contre les réformes à venir du gouvernement. À première vue, le malaise semble bien partagé, opposition et gouvernementaux présentant un front commun. Palsambleu ! Ce qui trébuche, peine à venir dans le mouvement social (ne parlons pas de la gauche parlementaire…), voit le jour dans les élus. Dans le courant libertaire, le moins qu’on puisse dire c’est que les élections ne nous passionnent pas. Au niveau local, il y a bien des camarades qui tenteraient l’aventure de ce qu’on appelle le « municipalisme libertaire » 1 mais l’espoir reste encore en suspend.
Au fait, fronde ou grogne des élus locaux ? Selon le dictionnaire Quillet de la langue française, il s’agit dans le premier cas d’une « arme de jet faite de corde ou de cuir pour lancer des pierres ou des balles en les faisant tourner rapidement ». Le second terme désigne un « grognement, de la mauvaise humeur », cela désignait aussi les grognards, soldats de la garde impériale, prêts à aller en découdre après avoir renâclé.
Pour en revenir au premier terme, la Fronde a désigné (de 1648 à 1653) des troubles internes dans le royaume de France. Louis XIV n’était pas encore majeur. Pour faire court, il y eut la Fronde dite parlementaire (1648-1649), avec des barricades élevées par la population parisienne et la Fronde des princes avec affrontements avec les troupes royales. 2
Pour en revenir à nos moutons, c’està- dire au XXIe siècle, il s’agit d’une levée de boucliers contre ce que la presse nomme le « projet de réforme Balladur-Sarkozy des collectivités ».
Si on fait le parallèle avec le Grand Paris on pourra voir l’étendue des dégâts. Dans le cas de l’Île-de-France, les premières attaques se précisent. En premier lieu, maires et administrés sont mis de côté dans l’aménagement autour des gares. Des promoteurs amis des pouvoirs publics peuvent donc acquérir ces précieux terrains. La région Île-de-France sera donc remodelée à la guise du gouvernement. Sans demander leur avis aux communes, aux élus locaux, les princes qui nous gouvernent pourront aménager et préempter des terrains « jugés nécessaires pour faire avancer les projets du gouvernement ».
Donc, en gros, les collectivités locales seront sur la paille, et ça concerne tout le monde, même celles et ceux qui pour diverses raisons, ne participent pas aux élections, même locales.
Exaspérations face aux réformes, moins d ‘état, plus d’autonomie, un Premier ministre sifflé, il y a à boire et à manger.
Bon, bien sûr, ce n’est pas aux lectrices et aux lecteurs du Monde libertaire que l’on apprendra que gérer une commune ne se fait pas toujours selon les intérêts de celles et ceux qui y habitent. Magouilles, délits d’initiés, pots de vins et tutti quanti existent à la tête de l’État comme dans maintes localités. Dans des hebdomadaires on s’amuse à vouloir dénoncer « la vérité sur le train de vie des élus », leurs « revenus, avantages en nature, notes de frais ». Tout serait-il donc corrompu, à tous les échelons et « l’émergence de la cité et de l’espace politique qui a résulté de la révolution urbaine » vouée à no future ?
Il est vrai que les efforts militants pour une démocratie dite « locale » ou « participative » ne font pas encore florès. Que les lendemains rayonnants pour un municipalisme libertaire ne sont pas encore perceptibles. En revanche, le mouvement ouvrier traditionnel est encore là, avec ses imperfections et ses dérives. Il n’y a pas de solution miracle, et souvent député varie, bien fol qui s’y fie !


1. Murray Bookchin, anarcho-communiste américain, a écrit Pour un municipalisme libertaire (paru à l’Atelier de création libertaire). En vente à la librairie du Monde libertaire, 4 euros.
2. Donc déjà il y a des siècles, bon peuple et possédants n’avaient pas les mêmes intérêts. CQFD.